Vampire Weekend
“CONTRA”
Les New-Yorkais de Vampire Weekend, autant cérébraux qu’instinctifs, sauvages que conceptuels, après un premier album en 2008 qui avait excité les plumes et conquis les oreilles bien au-delà des frontières américaines, reviennent en 2010 avec un deuxième effort studio, “Contra”, pochette sensuelle et polaroïd et qui dévoile une inconnue, femme blonde au regard ambigu. Sur ce disque à la production chirurgicale, orchestrée par Rostam Batmanglij (également claviers et déjà derrière les manettes en 2008), on découvre la capacité du groupe à préférer le défrichage au confort. Des envolées épileptiques d’avant, on passe à une sorte de pop hybride, caressée au ska, à Paul Simon encore, celui de “Graceland” (que le groupe avait déjà évoqué avec ses premiers titres) et à plein d’autres choses pas encore répertoriées, on entend des chansons qui acceptent de ralentir, qui existent même parfois sans batterie. Ezra Koenig (chant et guitare) : “C’est un disque plus varié en termes d’émotions, de sons, de dynamiques, de tempo. On a voulu explorer des territoires vierges... La Californie était l’influence de départ. Ensuite c’est parti dans pas mal de directions différentes. C’est ça qu’on aime, nous surprendre nous-mêmes.” Le groupe, pour la première fois, acceptera de quitter New York pour créer, partira même en tournée au Mexique pendant la phase de composition, histoire d’offrir ses nouvelles idées à un autre soleil. Le résultat est déroutant, enthousiasmant, jubilatoire. “Contra” est un disque qui va dans l’autre sens, celui de la difficulté et de l’identité mais toujours en privilégiant le plaisir, l’instant, pour celui qui joue comme pour celui qui écoute, un disque tournant autour de l’idée d’opposition, de conflit et de la dichotomie que cela peut générer. C’est aussi le prolongement indéniable du “Paul’s Boutique” des Beastie Boys, sorti en 1989. New York toujours. On retrouve le même goût du quotidien transfiguré, de la ville qui voit ses ombres se choisir de drôles de destins, des influences qui se télescopent pour mieux édifier quelque chose de fier, de fort, d’indestructible. Ezra : “C’est un disque qui m’a bouleversé. Et qui nous a montré qu’un même morceau pouvait être différent, pouvait être multiple, sans jamais se perdre.” “Contra” est pour tout le monde.