Adele
“21”
26 millions d’exemplaires vendus alors qu’elle a tout juste l’âge d’entrer dans les casinos de Las Vegas où se produit Céline Dion. Le moins que l’on puisse dire, c’est que le second album de cette diva teenage qu’était Adèle n’est pas passé inaperçu. Et en plus, à la place de René Angelil, on a droit à Rick Rubin : autant dire qu’on y gagne au change avec une barbe (et un CV de producteur) autrement plus fournie. Rick, qui débuta sa carrière comme producteur de LL Cool J et Slayer, est la botte secrète de la jeune chanteuse. C’est lui qui décidera de ne pas inclure la technologie dans le son de l’album, refusant samples et synthétiseurs au profit d’un groupe de cadors parmi lesquels le bassiste Pino Palladino et le pianiste James Poyser. Isolée de son entourage afin de la pousser dans ses derniers retranchements vocaux, Adèle donne un relief inattendu aux cinq compositions dirigées par Rubin, “One And Only”, “He Won’t Go”, “I’ll Be Waiting”, “Don’t You Remember” et “I Found A Boy”, ce dernier uniquement disponible sur le pressage US de l’album. Comme sur son prédécesseur “19”, on retrouve cette obsession pour le son soul Motown, évidente sur “Rolling In The Deep”, un fuck you à son ex-amant avec des traces de gospel, et de disco pour faire bonne mesure. On pense parfois à Dusty Springfield, autre Blanche fascinée par la soul noire américaine, mais la voix d’Adele est à la fois plus puissante et plus fragile que celle de la chanteuse des sixties. “Rolling In The Deep” emporte l’album dans la stratosphère (classé dans douze charts Billboard différents aux USA), suivi des singles “Someone Like You”, “Set Fire To The Rain” et “Rumour Has It” (produit par Ryan Tedder de OneRepublic). Rick Rubin a plus tard raconté à quel point l’émotion émanant de la voix d’Adele a transformé l’enregistrement de ce disque en un moment de grâce : “Les musiciens étaient inspirés comme rarement, surtout qu’ils ont de moins en moins l’occasion d’enregistrer avec les artistes présents dans le studio.” Devenu un classique soul des années 2010, “21” a placé Adele dans l’histoire. A tel point que même la légende soul Aretha Franklin, qui s’essaya à “Rolling In The Deep” trois ans après sur son album de reprises “Sings The Great Diva Classics”, n’a pas su transcender l’émotion suprême de la jeune vocaliste.