Rock & Folk

Metronomy

“LOVE LETTERS”

- BASILE FARKAS

La trajectoir­e de Joseph Mount est étonnante. A rebours de l’époque, ce garçon du South Devon a démarré Metronomy avec un esprit très électroniq­ue (“Pip Paine...” en 2006), signant un deuxième disque très accrocheur (“Nights Out”) puis, à l’émerveille­ment général, un disque de pop à l’ancienne, où la batterie, la basse, les arrangemen­ts se déployaien­t avec une dynamique et une humanité splendides. L’homme qui s’était fait un nom en signant des remix electro soudain sortait avec “The English Riviera” un album consacré au rivage anglais, qui avait plus à voir avec “... Melody Nelson” ou “Rumours” qu’avec Kavinsky. Qu’allaient faire Mount et ses aimables comparses pour la suite ? Une certaine goguenardi­se a dû s’emparer des puristes en apprenant que “Love Letters” avait été conçu au studio Toe Rag, lieu londonien vénéré pour son 8-pistes à bande par tout le gotha garage (White Stripes, Billy Childish et cie). “Love Letters”, en réalité, n’est pas spécialeme­nt un disque rock. On comprend en fait dès “The Upsetter” que Mount a désiré se servir de conditions d’enregistre­ment spartiates et analogique­s pour mieux servir son propos : intime, personnel, à coeur ouvert. Des lettres d’amour donc. Enregistré­es sur bande deux pouces et livrées sans retouche, comme on prendrait son plus beau stylo à encre pour écrire à l’être aimé. Voilà ce qui est beau dans ce disque : son côté adolescent, très premier degré, traduit donc sur des chansons splendides, car sincères et habitées. Sur fond de boîtes à rythmes préhistori­ques et de vieux synthés Juno, Mount raconte sur l’incroyable “Call Me” une romance chaotique, des errances dans les rues de Paris. Ce type, donc, excelle dans l’art de transforme­r ses sentiments en chansons pop tristes : la collection est imparfaite, minimalist­e dans les arrangemen­ts mais richissime. “Reservoir” retrouve le charme des vieux Elli Et Jacno : naïveté, mélancolie et synthés. “Month Of Sundays” est sans doute un tribut au rock indé des jeunes années, tandis que “Boy Racers” rend un hommage maladroit à l’italo disco. Sans l’edit numérique, on s’aperçoit que les Metronomy ne sont pas des musiciens exceptionn­els. La voix flanche un peu, le placement est imparfait, mais cette chose désuète nommée émotion est en revanche bien là. Décidément porté sur la tradition, Mount, a même eu la politesse d’écrire un tube : le hippie et joli “Love Letters”.

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