Rock & Folk

Mac DeMarco

“ANOTHER ONE”

- BASILE FARKAS

Il porte une salopette, une casquette d’enfant et des tennis trouées. Il adore les blagues potaches, “Les Simpson” et, en toute logique, se filme parfois en train de faire le coup du briquet quand il a des gaz. Non, Mac DeMarco n’est pas un enfant de onze ans, mais l’une des forces vives du rock souterrain nord-américain. Depuis le début de la décennie, ce Canadien épate la galerie avec des albums enregistré­s à la maison et intégralem­ent joués par ses soins. Face au phénomène, les journalist­es ont été ravis de pouvoir ressortir les termes bricoleur et branleur, qu’ils utilisaien­t beaucoup moins depuis la fin des années Beck. En fait, Mac DeMarco est surtout d’une génération qui a inventé son propre monde plutôt que d’aller sonner chez les majors qui, de toute façon, ne se seraient probableme­nt pas intéressée­s à lui. D’album en album, il a progressé, jusqu’à l’excellent “Salad Days” en 2014. Un an après, il publie ce court (huit chansons) “Another One” et acquiert une profondeur nouvelle. Que s’est-il passé ? Comme beaucoup de gens bien, le Mac s’est semble-t-il fait larguer par sa dulcinée et s’en trouve fort attristé. C’est une aubaine pour l’auditeur, l’homme d’Edmonton sort là les plus belles chansons de sa jeune existence (il a alors 25 printemps). Sur son 6-pistes à bandes, il couche des suites d’accords ouatées (jouées sur Roland Juno, comme Tame Impala), joue de la batterie comme un dieu et se révèle habile à la basse. A la guitare, c’est aussi un styliste unique, ses rythmiques vaguement funky ne sonnent comme rien de connu. DeMarco est un JJ Cale des années Twitter, un Stephen Malkmus au coeur brisé et cet album, un futur classique. Il parle de l’être aimé sur des titres faussement guillerets et réellement bouleversa­nts (“The Way You’d Love Her”, “No Other Heart”), bâtit des ballades belles comme du Beach Boys (“Another One”) et fait du soft rock qui a de l’âme (“A Heart Like Hers”). Pour commenter ce disque parfait, conçu au bord de mer dans sa nouvelle maison du Queens (dont il donne l’adresse sur la dernière plage), Mac DeMarco s’est contenté de dire : “J’ai essayé d’en parler mais, à mon avis, personne n’a jamais vraiment compris l’amour.” C’est vrai et néanmoins très réussi.

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