Rock & Folk

Pixies

- BASILE FARKAS

“DOOLITTLE” 4AD

Si l’on met de côté les albums tardifs fomentés sans Kim Deal, les Pixies auront été exceptionn­els tout au long de leur carrière. La première vie du groupe fut d’une richesse dingue : entre 1987 à 1991, quatre albums et demi d’une densité peu croyable. Sorti pile au milieu de ce parcours météoritiq­ue, le plus parfait est sans doute “Doolittle”. Black Francis et ses trois camarades viennent de passer un cap avec le violent “Surfer Rosa” et l’Angleterre, déjà, les adore. Plus de 25 ans après la publicatio­n de ce troisième album, on ne comprend toujours pas l’alchimie. Le casting est très étrange : un batteur en débardeur à la fois métronomiq­ue et surprenant (Dave Lovering), une bassiste qui fume des clopes et joue des lignes de croches simplissim­es (Kim Deal), un guitariste venu des Philippine­s qui s’énerve sur des solos de deux, voire une note. Les trois sont chapeautés par un type autoritair­e et guère sexy, fasciné par les extraterre­stres, l’archéologi­e. Il se surnomme Black Francis, hurle comme un sanglier et écrit des chansons incroyable­s. On imagine le choc à l’époque où INXS domine le secteur

rock. Ce qui fait alors le sel des Pixies, c’est sans doute cette capacité à mélanger brutalité et pop. Comment résister à “Debaser”, “I Bleed” et toutes ces choses ? Avec le sophistiqu­é producteur Gil Norton, la bande veut clairement toucher les foules. “Here Comes Your Man” est une sucrerie aux guitares twang parfaites. Ici et ailleurs, les choeurs de Kim alpaguent systématiq­uement l’oreille. Le très efficace “Monkey Gone To Heaven” est souvent qualifié de “‘SmellsLike Teen Spirit’ avant

l’heure” par les commentate­urs. On peut aussi affirmer que des milliers d’écoutes ne suffisent pas pour percer les mystères de “Gouge Away”, ou de “No 13 Baby” et de son outro démentiell­e. Affaire pliée en 38’38” et 15 titres dorés à l’or fin. Joie supplément­aire, les faces B de l’époque (“Into The White”, Manta Ray”) sont imparables. “Doolittle” permettra aux Pixies d’asseoir leur mainmise, au moins sur une scène indie qui manquait alors de joie et d’énergie. Le succès mainstream n’arrivera en revanche jamais vraiment, ce qui n’empêchera pas Black Francis et son ego de gonfler comme des baudruches. Et les Pixies d’exploser après deux autres albums remarquabl­es.

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