The Stone Roses
“THE STONE ROSES” SILVERTONE
En 1989, après la séparation des Smiths, la Grande-Bretagne musicale se cherche de nouveaux messies. Depuis les Etats-Unis, souffle un nouveau courant musical, baptisé house music. Toujours prompte à réagir, l’Angleterre s’est déjà approprié ces rythmes robotiques qui exhortent le corps à se mouvoir. A Manchester, un club, la Haçienda fait salle comble lors de soirées spécialisées et c’est là que se retrouve toute la jeunesse débonnaire de la ville. Les Stone Roses existent alors déjà depuis quatre ans, ont réalisé deux maxis complètement occultés et végètent dans leur coin. Mais, grâce à l’aide de l’intelligentsia de la ville — Peter Hook ( New Order) va produire un de leurs meilleurs titres, “Elephant Stone” — en découvrant les substances illicites, en s’inventant un look incroyable (bobs, pantalons pattes d’eph, T-shirts XL), le groupe, emmené par le jaggerien Ian Brown et le hendrixien John Squire, soutenus par une section rythmique tout bonnement hallucinante de sensualité groove (Mani et Reni), va passer en quelques mois des bas-fonds aux sommets. Pourtant, ce premier album, aux allures classiques, dévoile ses racines sixties et psychédéliques — les Byrds ne sont jamais très loin — mais est truffé de gimmicks suffisamment accrocheurs pour que “The Stone Roses” devienne une pierre angulaire de la pop britannique, inspirateur de toute une génération de musiciens, pour le meilleur (The Charlatans) ou pour le pire (Paris Angels). Entre une déclaration d’intention (l’hypnotique “I Wanna Be Adored” en ouverture) et un soupçon de morgue altière (“I Am The Resurrection” et son final désespérément funky), le quatuor commet certes quelques faux pas (“Waterfall” ou “Elizabeth My Dear”, décalque du “Scarborough Fair” de Simon & Garfunkel) mais signe avec “Made Of Stone” l’un des plus beaux titres de l’histoire de la pop. Squire, qui a également réalisé la pochette, y fait montre d’un toucher parfait et original tandis que Brown est un chanteur au charisme inégalé depuis. Le deuxième album, “The Second Coming”, réalisé en 1994, sera injustement massacré par la critique et Squire quittera le navire en pleine tournée fin 1995. Reste donc “The Stone Roses”, un album qui, sans le savoir, a fait entrer la Grande-Bretagne dans les années 90 quelques mois avant tout le monde.