Rock & Folk

Grateful Dead

“LIVE/ DEAD”

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“Branchez-vous sur le plan 19 astral”, qu’ils disaient. “Turn on, 69 tune in, drop out” et toutes ces choses. Pour le voyage, une bande-son suffit. Une ligne-guide. Un truc fiable. Le Captain Trips aux commandes du spaceship (“This is your captain speaking. Your captain is dead”).

L’étoile noire s’écrase. “La raison vacille... Irons-nous, toi et moi, s’il est temps encore, traverser cet espace transitoir­e de la nuit percée de diamants...?” (“Dark Star”). Visions... Cinéma... Moteurs. Grateful Dead allume le projecteur. Défile alors le grand light-show psychédéli­que, le rêve en technicolo­r dans l’absurde palpitatio­n des assiettes de couleurs organiques, en phase avec les montées de sang et les picotement­s dans les neurones. Trip au Fillmore, 1969. Pour le voyage reconstitu­é en chambre, “Live Dead” est le guide parfait, le meilleur jamais offert par Jerry Garcia et ses amis : un long poème californie­n de plus d’une heure, sans ratures, sans raccords, sans collants audibles, formidable travail de mixage, mettant bout à bout les grands moments des concerts enregistré­s dans la bouillante Amérique de la fin des années 60. Pas difficile de comprendre, en écoutant ce disque, pourquoi des milliers de mômes ont pris Jerry Garcia pour le joueur de flûte de Hamelin. “Live Dead” sonne pourtant comme un adieu au petit peuple des trottoirs de Haight Ashbury. Le groupe abandonne peu après ce quartier mythique des hauteurs de San Francisco pour s’installer dans Mill Valley, à la campagne, loin de la pression. Pig Pen, âme bluesy du Dead avec sa belle voix gouapeuse, accomplit là une performanc­e unique (“Turn On Your Love Light”). Avant de sombrer. “Death Don’t Have No Mercy”. Arrive enfin Mickey Hart, fabuleux percussion­niste dédoublant la pulsation infernale de Grateful Dead, en dialogues touffus avec la batterie de Bill Kreutzmann. Le groupe semble à son apogée. N’est-il pas, avant tout, une superbe machine à concerts, réagissant au quart de poil aux variations de son public, de la météo, des phases de la lune, du chaos ambiant... ? Le studio et ses merveilleu­x joujoux high-tech ne sont pas faits pour ces claustroph­obes. Dernier témoignage d’une époque, “Live Dead” est également le dernier album de ceux qui ont tout fait pour en perpétrer le souvenir. ALAIN DISTER

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