Gene Vincent

“GENE VINCENT AND THE BLUE CAPS”

CAPITOL

A-t-on jamais rien entendu d’aussi sauvage que “Double Talkin’ Baby” ?! Successions de breaks stupéfiants et de cris déments, la chanson défile à une vitesse infernale... C’est l’une des douze merveilles qui font de “Gene Vincent And The Blue Caps”, deuxième album de l’artiste, l’un des plus importants disques de l’histoire du rock. Publié sept mois auparavant, “Bluejean Bop !” avait déjà démontré que Gene Vincent était aussi performant sur la distance longue (un album entièrement original) qu’en simple, se payant même le luxe de ne pas y inclure son premier succès, “Be-Bop-A-Lula”. La notion de groupe est prépondérante en matière de rock. Précurseur, Gene Vincent met en avant les Blue Caps. Il faut dire qu’ils sont particulièrement affûtés. A la batterie, Be-Bop Dickie Harrell frappe les peaux avec la fougue de ses seize ans et pousse des hurlements pour que ses copains sachent que c’est bien lui qu’on entend dans le disque ! Galloping Cliff Gallup — un vieux de 26 ans ! — était parti pour ne plus passer son temps en tournée. On l’a supplié de revenir apporter sa magie à l’enregistrement. Guitariste fluide, fécond, novateur, inspiré, influent ; pour lui, aucune frontière entre rock, blues, country et jazz. A la tête de son équipe, Gene Vincent fonce sans s’économiser. Comme un possédé, il pratique une langue inconnue, forcément démoniaque. “Bi-I-Bickey-Bi Bo-Bo-Go”... Quand il cesse de tirer à boulets rouges, il révèle une sensibilité d’écorché-vif, interprétant “Unchained Melody” ou “I Sure Miss You” avec une finesse qui ne peut que bouleverser. L’instant d’après, le voici menaçant, sorcier transformé en “Cat Man”. Les glissés de Cliff Gallup sont aussi inquiétants que les éclats du chanteur. La voix toujours en place, impeccablement juste, touche l’auditeur à l’âme. Comme il se doit pour un disque génial, la pochette est réussie grâce à une photo de Gene Vincent et son gang prise pendant le tournage du film “The Girl Can’t Help It”.