The Who
“WHO’S NEXT”
TRACK
1971. Le réveil. Gueule de bois carabinée. L’heure des comptes, des prises de conscience obligées. Woodstock, Wight, loin tout ça, très loin. Paul, John, George et Ringo qui déboussolent pour de bon une Angleterre soudain orpheline de ses quatre points cardinaux. Jimi, Janis et Jim, la trilogie évanescente, tombée au champ d’honneur, sacrifiée sur l’autel du tout pour le tout. D’ailleurs, avec sa pesanteur qui n’a rien de gratuit et sa colère crachée à la gueule du monde, ce “Won’t Get Fooled Again” que l’on va se passer, se repasser, sur lequel on va se poser, se reposer, dit-il autre chose ? Ne plus se laisser avoir... Time of
innocence ? Definitely over. S’imposer ou imploser, mûrir ou mourir... Oser un ultime A qui le tour ? sarcastique et grinçant, pour mieux trancher les liens avec cet hier-laboratoire, mais en garder la quintessence... Tommy aussi a plié bagages. A quoi bon tenter de le retenir à travers “Lifehouse”, projet grandiloquent qui mêlait un peu benoîtement réflexions sur le monde, la jeunesse et l’avenir du rock ? Et puis, d’abord, où va-t-il, le monde ? Et avec lui, le rock ? Tant qu’à balancer un pavé dans la mare, celui-ci ne se doit-il pas d’être compact, dense à en défier les lois de la gravité...? Pour peu que l’on se montre patient, il sera toujours temps demain de se rattraper, de voir à nouveau les choses en grand, de parler de quadriphonie... Mais, pour l’heure, il convient donc avant tout de canaliser, de rentabiliser cette rage si généreusement dispensée jusqu’ici, de Leeds au Fillmore East. Le rock est aux abois ? La pop se mord la queue ? Le blues est encore sous respiration artificielle, malgré ce british boom que l’on disait revivifiant ? Que l’on compte sur nous pour y remédier, à notre façon. Des coups de fouet, on va leur en fournir. Vont comprendre leur douleur. Quitte, pour ce faire, à s’en bousiller les cordes vocales, se démonter l’épaule en attaquant chacun des riffs, faire rougeoyer les fûts jusqu’à en décrocher la... Lune, laisser piano et orgue occuper le terrain impunément, obliger “My Wife” à récurer les cuivres, voire, pourquoi pas, emprunter des chemins de traverse, comme cette furtive redécouverte de l’Orient aux détours d’un “Baba O’ Riley”. Reprendre l’initiative, quoi. Et toujours avec le même leitmotiv en ligne de mire : ne plus se faire baiser.