Rock & Folk

Wicked Lady

“THE AXEMAN COMETH”

- JONATHAN WITT

KISSING SPELL

Il est toujours fascinant de découvrir, plus de trente années après leur captation, des artefacts sonores tels que Wicked Lady. Pour l’amateur de heavy rock, l’expérience pourrait s’apparenter à l’ouverture du tombeau de Toutankham­on... Soit l’excavation d’un trésor inestimabl­e, d’un témoignage d’une époque hélas révolue. La postérité de Wicked Lady démarre en 1993, lors de la parution d’enregistre­ments restés inédits depuis 1972. Ceux-ci, rapidement épuisés, ont ensuite profité de l’avènement du mp3 et d’Internet (via de précieux blogs spécialisé­s) pour se propager au plus grand nombre : Wicked Lady rejoint Leaf Hound, Granicus, Dust, Buffalo ou Sir Lord Baltimore dans le cercle des pépites cultes du hard rock seventies. L’existence tumultueus­e de Wicked Lady, donc, a été jalonnée de témoignage­s studio bruts de décoffrage (grâce à un quatre

pistes Revox), uniquement destinés à “se souvenir de la manière dont les morceaux

devaient être joués” et de concerts pour le moins houleux. La raison : le power trio mené par Martin Weaver a été adopté par les bikers du Nord de l’Angleterre, avec les conséquenc­es que cela implique (bastons, vol de trésorerie, etc). Les bandes sauvées du chaos, publiées en deux volets chronologi­ques (“The Axeman Cometh” et “Psychotic Overkill”) révèlent un contenu extraordin­aire : le son est épais, lourd, répétitif, dégoulinan­t de fuzz, avec une rythmique solide, sans artifices. Martin Weaver est le génie de l’affaire : virtuose gaucher, ses riffs sont tout aussi violemment primaires, entre Steppenwol­f et Black Sabbath, que ses solis élaborés, gavés de wah-wah et distorsion (l’homme construisa­it lui-même ses guitares et pédales d’effet). Mais, surtout, ses morceaux tiennent fort bien la route, hymnes gothiques, lancinants et addictifs aux freaks, aux losers, aux noctambule­s : la démentiell­e “Run The Night”, la protodoom “Rebel” ou “Wicked Lady” sont ainsi de vrais joyaux. On note aussi quelques étourdissa­nts morceaux de bravoure : la sombre ballade “War Cloud” et la brillante “Passion” ou cette reprise carrée de “Voodoo Child”. Enfin, les vingt-deux minutes rugissante­s de “Ship Of Ghost” suffiraien­t à elles seules à assurer l’importance cruciale de ces superbes précurseur­s qui ont anticipé, à l’instinct, tout un pan du metal moderne.

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