The Yardbirds
“ROGER THE ENGINEER” COLUMBIA EMI 19 66
Deuxième album du groupe, après quatre 45 tours avec Jeff Beck, paru en août 1966 en Angleterre chez EMI sous le titre “The Yardbirds”, sous-titré Roger The
Engineer (en France sur Riviera sous celui de “Over Under Sideways Down”), dont une version mono a circulé, avec un autre mixage (on y découvre d’autres parties de guitare...). Jeff Beck avait rejoint le groupe début 1965 et il y est demeuré vingt mois. Si le jeu d’Eric Clapton restait conventionnel, celui de son remplaçant, plus sauvage, esbroufait les spectateurs en reléguant le chanteur/ harmoniciste et fondateur Keith Relf à un rôle d’accompagnateur. Le groupe octroie pourtant peu d’espace à Jeff Beck sur les disques, mais celui que le guitariste prend compte à l’époque parmi les choses les plus révolutionnaires qu’on puisse réaliser avec une six-cordes électrique, plus d’un an avant l’apparition de Jimi Hendrix. Enregistré en une semaine, l’album est multicolore : boogie, R&B, influences orientales. Il débute avec une composition commune sur laquelle Relf brille à l’harmonica, “Lost Women”, suivie du nouveau simple, l’arabisant “Over Under...”, et la trouvaille tournoyante de Beck et une partie de basse du même qui monte en volume. Ce titre est pourtant un échec relatif dans les charts (après quatre simples classés dans les trois premiers). Jeff écrit et chante le shuffle “The Nazz Are Blue”, un riff qui démarre brutalement après deux coups de caisse claire et qui est ponctué plus tard de deux courts solos tuants. Mais Jeff Beck n’est pas le groupe à lui seul. Le son est collectif, même si Relf a parfois du mal à se faire entendre. Le second guitariste Chris Dreja est au piano sur “Hot House Of Omagararshid”, une curiosité d’inspiration hindoue qui divisa les fans des Yardbirds en son temps. “Turn Into Earth” et ses choeurs grégoriens rappellent “Still I’m Sad”, et le grand morceau de l’album est l’instrumental “Jeff’s Boogie” (toujours au répertoire live de Beck), une explosion rythmique, un feu d’artifice du guitariste. Il était déjà un innovateur au niveau des effets, ce que certains prenaient pour des gimmicks. Il y développait seulement son style inimitable. Crédité au groupe entier, “Jeff’s Boogie” est en fait pompé sur le “Guitar Boogie” de Chuck Berry paru sur son deuxième album huit ans plus tôt. JEAN-NOEL OGOUZ