The Butterfield Blues Band
“EAST-WEST” ELEKTRA 19 66
C’est en 1963, à Chicago, que l’harmoniciste/ chanteur Paul Butterfield forme un groupe avec Elvin Bishop (guitare), Jerome Arnold (basse) et Sam Lay (batterie), ces deux derniers ayant, entre autres, accompagné Howlin’ Wolf. L’année suivante, sa formation prend de l’ampleur avec l’intégration du guitariste Michael Bloomfield, puis avec l’arrivée, en 1965, de l’organiste Mark Naftalin, juste avant les séances de l’album homonyme. Plébiscité par public et critiques, ce premier disque se situe dans la tradition du blues électrique de Chicago. Un an plus tard paraît “EastWest”. Il est enregistré en juillet dans le temple du blues de Chicago, les studios Chess, avec Billy Davenport remplaçant Sam Lay, malade. Le son général s’est étoffé, plus puissant, plus dynamique. Si les solos de guitare sont répartis entre un excellent Elvin Bishop et Mike Bloomfield, ce dernier prend dorénavant une part importante dans les orientations musicales et se révèle un véritable génie de la six-cordes. Portés par des interprétations énergiques et inspirées, en particulier les reprises de “Walking Blues” (Robert Johnson) et “Two Trains Running” (Muddy Waters), sept des neuf titres demeurent dans le droit fil du Chicago Blues. Mais les deux restants, deux longues plages, presque huit minutes pour “Work Song”, une composition du jazzman Nat Adderley, et plus de treize pour “East-West”, éclatent les frontières du genre, transfigurant le disque en un brûlot novateur. “East-West” est une composition instrumentale du duo Mike Bloomfield et Nick Gravenites, bâtie sur l’interaction des structures du raga indien, du blues et du rock. On raconte que Bloomfield aurait imaginé ce morceau sous LSD. En réalité, il a surtout été amené vers cette approche radicale par sa fascination pour John Coltrane. Les solos de guitare exceptionnels qui s’y entrecroisent vont bouleverser le paysage du rock, ouvrant la porte du psychédélisme, en y insufflant également une pratique de l’improvisation venue du jazz. Mort en mai 1987, Paul Butterfield enregistra, avec différentes formations, plusieurs très bons albums dans les années 70. Quant à Mike Bloomfield, ayant quitté le groupe après “East-West”, empêtré dans ses problèmes d’addiction, il finira une carrière parsemée de quelques éclairs magnifiques sur le siège d’une voiture en février 1981 à San Francisco, victime d’une overdose.