Ty Segall & White Fence
“Joy”
DRAGCITY/DIFFER-ANT
“Hair”, l’album collaboratif entre Ty Segall et White Fence paru en 2012 fait partie de ces disques qui ont acquis un statut culte de façon quasi instantanée. Croisement entre deux artistes qui faisaient alors partie de l’underground florissant de San Francisco, c’est le disque qui les a menés au grand public rock et qui, par un simple jeu de frustration (le duo ne l’a quasiment jamais joué sur scène ensemble) a gagné une certaine aura. Sans doute autant mus par l’envie de collaborer à nouveau que de faire cesser les questions récurrentes autour de “Hair”, Ty Segall et Tim Presley ont trouvé le temps dans leur emploi du temps chargé pour lui donner une suite. Comme son prédécesseur, “Joy” est un disque aussi concis (quinze morceaux en trente minutes) que minimaliste. Presley, dont le jeu de guitare est de plus en plus déstructuré, et Segall prennent un plaisir manifeste à expérimenter, à laisser s’échapper leurs idées et à les stopper de façon abrupte alors qu’elles ne semblent pas avoir tout à fait été explorées. Le duo livre un rock psychédélique décharné, volontiers louche et oppressant (“Other Way”), parfois beefheartien dans l’esprit. Les morceaux de Segall sont assez identifiables (“Please Don’t Leave This Town”, “Do Your Hair”, “My Friend”) et plus accessibles que ceux de Presley, ceux-ci s’avérant plus heurtés et alambiqués (“Good Boy”, “Tommy’s Place”). Moins évident que “Hair”, “Joy” comporte son lot de pépites (“Body Behavior”, “Hey Joel, Where You Going With That ?”) dans un environnement lo-fi qu’on est heureux de voir Segall retrouver et annonce une tournée du duo, un événement qu’on attend avec une certaine impatience. ERIC DELSART