Rock & Folk

Usé

“Selflic”

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BORNBAD

Il ne passe ni chez Ruquier, ni à la radio. Au Vélib et aux réseaux sociaux, Nicolas Belvalette, le citoyen qui incarne le projet Usé, préfère le chaos et le courage. Sa réputation de sabordeur allumé lui vient de ses concerts foutraques et sans filet. Mais ce nouvel album au titre délicieux, “Selflic”, avec sa pochette surréalist­e et son contenu explosif, indique qu’ici, un artiste respire, haut et fort. Un artiste qui accepte de regarder ce que nous sommes sans tortiller, un sourire d’enfant sauvage en coin et l’envie d’en découdre avec la bêtise ambiante. Physiqueme­nt, il est un David Guetta à qui tous les physionomi­stes auraient refusé l’accès des clubs les plus branchés. Il porte le jogging et semble fuir le shampooing. Et surtout, depuis Ministère AMER, on n’avait pas autant jubilé en écoutant une chanson dédiée aux tuniques bleues : “Danser Un Slow Avec Un Flic” est une merveille boiteuse, un slow presque cold wave et drôle, à la froideur jubilatoir­e. Usé aime les sonorités bancales, les progressio­ns brumeuses, les climats à la fois poétiques et barbelés. Les bricolages qui doivent autant au hasard qu’à une ténacité admirable. Sa musique dépasse les codes, les obligation­s, les facilités et propulse celui qui écoute dans un univers de glace et de sueur, de sang et d’absolu. Jean Yanne punk, Choron revenu du Mordor, Usé ne veut pas séduire mais tout emporter. Et il le fait avec une bravoure et une foi absolument fédératric­es. Piano d’escalier, synthés de givre, cris possédés, voix habitées, accélérati­ons et trips, beats carnivores et folles cavalcades, les sept chansons de cet album sauvage et comme surgi d’une faille entre deux mondes, sont de jolis et intenses instants de transe. Usé est en fait l’antithèse d’Eddy de Pretto. Il sait que la vérité ne suffit pas. JEROME REIJASSE

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