L’ombre de John Cassevetes
Paranoïa
Drôle de type que Steven Soderbergh... Après avoir obtenu sa Palme d’or à Cannes il y a trois décennies avec “Sexe, Mensonges Et Vidéo”, le cinéaste tout-terrain n’a eu de cesse d’expérimenter ses talents sous les formes et les supports les plus divers. Du blockbuster tourné entre potes (la série des “Ocean’s Eleven” et ses suites) au film indé expérimental bizarre (“Bubble”) en passant par le téléfilm de luxe (“Ma Vie Avec Liberace”), les séries (“The Knick”) et même une série B de baston totalement décomplexée (“Piégée”). En gros, Soderbergh n’est jamais où on l’attend. Lui qui a annoncé plusieurs fois qu’il arrêtait le cinéma, y revient pourtant avec “Paranoïa” tourné cette fois dans un format hors norme (mais peut-être plus pour longtemps) : le smartphone ! Une technique ultralégère qui lui permet de se scotcher au plus près des affres de son personnage principal : une jeune femme qui, harcelée par un ex, se retrouve enfermée contre son gré dans un asile à la “Vol Au Dessus D’Un Nid De Coucou”. Déambulant en boucle dans les couloirs du lieu, elle essaye de persuader le personnel hospitalier qu’elle n’a rien à faire ici. En vain... Porté par le jeu flippé et (forcément) paranoïaque de Claire Foy (révélée dans la série “The Crown”), le film fonctionne à fond, y compris dans ses outrances assumées ( actuellementensalles).
Mes Fères
Deux frangins rockers membres d’un groupe culte des années 90 (les Fish & Chips), retrouvent leur soeur qu’ils n’ont pas vue depuis un bail, occasion pour eux de remuer un passé douloureux. Et pour le metteur en scène, Bertrand Guerry, de s’immiscer avec une grande humanité dans cette fratrie où le mélange entre présent et passé, les travellings élégants et les plans pris sur le vif, permettent de mieux s’immerger entre les angoisses et les non-dits de personnages en quête de vie absolue. Une immersion psychologique d’autant plus tenue qu’elle est aussi servie par des musiques qui, comme le précise le réalisateur ,“ont le pouvoir émotionnel de retranscrire la beauté d’ un paysage, la dés illusion d’ un être humain et l’ espérance d’ une âme en peine .” La BO (Manu Chao, Requin Chagrin Talisco...) est bien sentie et l’ombre de John Cassavetes plane sur “Mes frères ”( actuellement en salles ).
The Guilty
Pas facile de maintenir un suspense en huis clos ! Dans des genres différents on peut citer les excellents “Out Of Order” de Carl Schenkel (quatre personnes sous tension coincées dans un ascenseur vicelard), “Cube” de Vincenzo Natali (cinq inconnus prisonniers d’une pièce cubique flottant dans l’espace intersidéral) ou — plus terre à terre — “Talk Radio” d’Oliver Stone où un cynique animateur de radio converse avec ses auditeurs. Peut-être le film le plus proche du danois “The Guilty” de Gustav Möller, où un homme travaillant pour les urgences de la police se retrouve en ligne avec une femme kidnappée. De son bureau et avec son seul téléphone, il va faire son possible pour la sauver à distance. Malgré son côté minimaliste (une succession de gros plans sur le flic inquiet), “The Guilty” parvient à garder sa tension grâce à une formidable bande son explicative, permettant au spectateur d’imaginer aisément ce qu’il se passe de l’autre côté de l’écouteur ( actuellementensalles).
Contrôle Parental
“Contrôle Parental” de Kay Cannon est une comédie trashouille franchement drôle. Du moins si on apprécie l’humour post“Saturday Night Live”, des Nuls ou les comédies adolescentes de Judd Apatow. Car d’ados, il est aussi question ici... Trois parents se mettent à flipper sévèrement le jour où ils apprennent que leurs filles respectives ont conclu un pacte pour perdre leur virginité pendant leur bal de promo. Joignant leurs efforts pour le pire (... et pour le pire), les adultes décident d’aller surveiller leur progéniture pour éviter que l’échéance fatale ne se produise. D’où une succession de coups de théâtre et de séquences absurdes et dégénérées. Les gags, vulgairement surréalistes, sont donc plutôt hilarants. Surtout qu’ils sont portés par des acteurs déchaînés prenant visiblement plaisir à se ridiculiser dans les grandes largeurs masochistes. Particulièrement, la star (du moins aux Etats-Unis) John Cena, ancien champion de catch devenu acteur dans des séries B d’action lambda (“The Marine” “12 Rounds”) et qui, au box office américain, commence sérieusement à marcher sur les plates-bandes de son rival Dwayne Johnson, autre catcheur devenu acteur ( ensallesle1er août).