Lemmy Kilmister à la basse
Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleures galettes microsillon du moment.
Rééditions Robert Calvert “Captain Lockheed And The Starfighters” Music On Vinyl
Dans le grand barnum psychédélique du Hawkwind du début des années 70, Robert Calvert tenait le rôle de poète et de chanteur intermittent. Pour son premier album solo sorti en 1974, Calvert s’est entouré d’un casting stellaire : Paul Rudolph et Dave Brock aux guitares, Nik Turner au saxophone, Lemmy Kilmister à la basse, Brian Eno et Del Dettmar aux synthés, Twink Adler et Simon King à la batterie. Ce beau monde a accouché d’un album aussi barré que son auteur et qu’on se réjouit de retrouver en vinyle.
Wire “Pink Flag”, “Chairs Missing”, “154” Pinkflag
Le post-punk commence ici. Sorti en novembre 1977, “Pink Flag”, le premier album de Wire, posait les bases de l’après-Pistols en jetant 21 pistes décharnées, d’une concision et d’une froideur cliniques. Cet albummonde à l’influence considérable (qui va du hardcore californien à l’indie américaine, en passant par la britpop et le garage lo-fi) et ses deux excellents successeurs — soit la période dorée du groupe — sont réédités en vinyle par le groupe sur son propre label. Les visuels sont absolument splendides, mais on regrettera toutefois l’absence de remasterisation analogique.
Cockney Rebel “The Human Menagerie”, “The Psychomodo” Parlophone/ Music On Vinyl
Plus théatraux que Bowie, moins extrêmes que Roxy Music, Steve Harley et Cockney Rebel figurent souvent parmi les grands oubliés du glam rock originel. Le groupe possède pourtant une discographie passionnante, comme l’illustrent ces deux albums — ses deux premiers — fraîchement réédités. Deux classiques glam de pop excentrique (“Hideaway”), volontiers arrogante (“What Ruthy Said”) et narquoise (“Mr Soft”), portés par le sens de la mélodie et les textes ironiques de Harley. Chaque album possède un chef-d’oeuvre absolu, à savoir la ténébreuse “Sebastian” pour le premier et la ballade désespérée “Tumbling Down” pour le second.
Count Five “Psychotic Reaction” Craft/ Universal
Archétype du groupe garage du milieu des années 60, Count Five n’a publié qu’un album, composé en partie de reprises (ici, “My Generation” et “Out In The Street” des Who) et interprété par des musiciens semi-compétents mais emplis d’enthousiasme et de fraîcheur.
Ce qui le sauve ? Ce son de fuzz absolument dément que des générations de guitaristes tentent de reproduire depuis 50 ans (“They’re Gonna Get You”) et surtout un tube, un classique, presque une anomalie sur cet album : “Psychotic Reaction” et son fameux rave-up. Réédité à partir des masters stéréo originaux, le disque sonne superbement.
The Music Machine “Turn On” Craft/ Universal
A l’inverse de Count Five, The Music Machine ne fut pas qu’un feu de paille. Si le premier album du groupe, sorti en 1966, possède les mêmes qualités archétypales (reprises à gogo, fuzz fabuleuse, tube garage), le groupe de Sean Bonniwell est bien plus convaincant sur la distance. Déjà en raison de la personnalité de son leader, aussi excentrique côté vestimentaire que mordant sur ses compositions (“Talk Talk” évidemment, mais aussi “Masculine Intuition” ou “The People In Me”). Cette réédition du premier album de The Music Machine pose en revanche un léger problème : remasterisée avec soin, elle est desservie par une pochette à la qualité d’impression douteuse.
The Left Banke “Walk Away Renée/ Pretty Ballerina” Music On Vinyl
Le titre de l’album indique à merveille le dilemme posé par Left Banke à sa maison de disques en 1967. Il était de coutume à l’époque de donner à l’album d’un groupe le titre de son single le plus marquant afin de capitaliser sa popularité (cf “Psychotic Reaction” plus haut, ou “Please Please Me” des Beatles). Or, ces jeunes New-Yorkais versés dans la pop baroque avaient écrit non pas un, mais deux chefs-d’oeuvre avec “Walk Away Renée” et “Pretty Ballerina”, deux chansons douces, illuminées de violons et de clavecin, qui ont fait entrer The Left Banke dans la postérité. Outre ses deux tubes, le groupe propose un album magnifique de délicatesse (“Shadows Breaking Over My Head”) qui s’aventure parfois en territoire country (“What Do You Know”). Les Négresses Vertes “Mlah”, “Famille Nombreuse”, “Zig-Zague”, “Trabendo” Because Ils l’ont dit le mois dernier : les Négresses Vertes ont choisi le prétexte des trente ans de “Mlah” pour revenir sur scène. Pour accompagner ce retour, les albums studio du groupe sont réédités en vinyle (un format dans lequel ils n’avaient pas été distribués à grande échelle à l’époque). Les amateurs se tourneront naturellement vers “Mlah” et “Famille Nombreuse”, albums aussi festifs que chamarrés où le charismatique Helno mène une drôle de danse punk méditerranéenne. “ZigZague” et “Trabendo” s’adressent plus aux complétistes, qui seront par ailleurs heureux de trouver la version CD offerte avec chaque album (et même un poster pour “Mlah”).
Sepultura “Arise” Roadrunner/ Roadracer
L’année Sepultura continue. Après la réédition de “Roots” au printemps, c’est l’autre album emblématique du groupe qui a droit à un retour sur galette noire. Un come-back bienvenu car le quatrième album du groupe n’avait eu droit, en 1991, qu’à une sortie extrêmement limitée. “Arise”, classique du death/ thrash metal, bénéficie pour cette réédition d’une remasterisation de rigueur et propose un deuxième disque empli de bonus (démos et extraits live) qui donnent un regard nouveau sur l’oeuvre des Brésiliens.
Nouveautés Don Glow “The Intention Flow” Casbah
Bien qu’actif depuis plusieurs années, le trio chambérien Don Glow ne sort son premier véritable album qu’aujourd’hui. Une riche idée : “The Intention Flow” dévoile un groupe mature et capable de dépasser ses influences psychédéliques. Stoner par instants (“Parallactic Dreams”), grunge dès qu’il accélère le tempo (notamment en raison d’un chanteur influencé par Kurt Cobain, comme sur “Bad Man”), mais plutôt à classer dans la catégories des astronautes de la six-cordes (“Almond Drive 21th”, “Project Hill”), Don Glow convainc sur son premier envol.
Quiet Dan “When The Earth Was Flat” Inoui
Parmi les piles de disques qui parviennent à la rédaction, se cachent parfois des merveilles inattendues. Dès les premières rotations du disque, on a su que Quiet Dan ne nous lâcherait pas de l’été, avec ses chansons douces (“Elmore Leonard Has Left Detroit”, “I’ll Show You What’s Love”, “Used To The Dark”) arrangées avec finesse (basses girondes, arpèges acoustiques, violons baroques, clarinettes). La pop folk et jazzy de ce Parisien, qui avait plutôt l’habitude d’occuper le côté de la scène, devrait l’amener sur le devant.
45 tours Michael Boothman & Kysofusion Band “Can’t Stop Dancing” Cree
Le label allemand Cree, après plusieurs rééditions de jazz groovy étonnantes (telle la fusion finlando-caribéenne d’Otinku), poursuit sa quête d’obscurités funky. Dernière trouvaille en date, ce single sorti en 1988, au rythme suave obsédant, parfaitement taillé pour les dancefloors d’aujourd’hui.