Bon Scott en père de famille attentif
De ses jeunes années passées à New York, René Goscinny, fin observateur d’une société en pleine mutation, était revenu avec quelques longueurs d’avance quant aux désirs d’émancipation de la jeunesse. Alors qu’il vient de créer, en janvier 1962, le personnage horriblement antipathique d’Iznogoud en compagnie du dessinateur Jean Tabary, il lance son antithèse, le personnage proto-hippie de Valentin Le Vagabond, deux mois plus tard toujours en compagnie du même dessinateur. Sorte deway fa ring st ranger avant la lettre, Valentin est un clodo éclairé, toujours propre sur lui. Sa gentillesse en fait une cible idéale pour les méchants de ce monde. Cette “Intégrale Volume 1” chez Imav Editions est l’occasion de redécouvrir une BD au charme désuet un peu anar qui n’oublie jamais de tirer sur une maréchaussée toujours aussi peu fûtée. Dans ce recueil, le bédévore retrouvera les 26 planches scénarisées par Goscinny, une quarantaine de pages d’archives, ainsi qu’une histoire inédite. Jeune maison pleine d’entrain, Revival signe son entrée dans le monde de l’édition avec le “Colville” de Steven Gilbert, une histoire se déroulant justement à Colville, une ville fictive de l’Ontario ; et qui met en scène toute une galerie de dégénérés qui va du couple de drogués délinquants à un motard chef de gang dont le fils donne dans le satanisme. L’histoire commence par un meurtre. Un homme court et se fait descendre sans qu’aucune explication n’accompagne les cases. On découvre alors les personnages centraux : David, un punk fan de Nick Cave And The Bad Seeds et Tracy, sa copine toxico. Après, c’est un déchaînement de violence dont aucun des protagonistes ne sort intact. Résolument hors norme, “Colville” est une BD oppressante, à situer quelque part entre David Lynch et un monde en noir et blanc rappelant Charles Burns ou Thomas Ott. Le 13 novembre 2015, Fred Dewilde décide de se rendre au concert d’Eagles Of Death Metal. Quelques heures plus tard, sa vie n’est plus du tout la même, mais il est bien décidé à la récupérer contre vents et marées. Huit mois après, survient l’attentat de Nice et la constatation sans fard que la peur ne l’a jamais quitté. Après une première BD, “Mon Bataclan”, où il racontait l’événement tel qu’il l’avait vécu, l’auteur décrit de manière claire et précise dans “La Morsure” (Editions Belin) toutes les difficultés que peut rencontrer une personne qui cherche à se reconstruire. Pour Fred Dewilde, il n’est pas possible de se lever le matin, d’apprendre la mort de 85 personnes et de se dire qu’on a, désormais, l’expérience pour supporter ça. Si une solution est possible, elle ne peut passer par la violence et la haine. Un livre à lire pour redécouvrir certaines valeurs. Le Franco-Burkinabé Damien Glez conjugue insolence et rapidité, qui font de lui un des meilleurs dessinateurs de presse. En 2000, il s’associe avec le journaliste Jean-Marc Mojon pour créer les personnages de Pete et Lord, une version satirique de Dieu et son fidèle Saint Pierre. Le résultat est plus proche des Ed Cercueil et Fossoyeur Jones de Chester Himes que de la représentation biblique habituelle. On le constate à la lecture de cette très belle compilation à l’italienne, “Divine Comedy”, éditée par les Editions Rouquemoute grâce à un financement participatif. L’ouvrage permet d’apprendre quantités de choses importantes : pourquoi on ne peut pas composer de blues au paradis, la raison de la mort de Ray Charles, l’intérêt de Jimi Hendrix pour la coiffure sans oublier une évocation de Bon Scott en père de famille attentif.