Rock & Folk

COURRIER

- RUDY RIODDES

L’archange noir du T-shirt

Hey Rock&Folk, merci pour cette belle image de Vince Taylor qui porte (on le devine) un tee-shirt vintage de... Vince Taylor ! Quand on a la classe... GILLES

Du Schmoll

En ces temps moroses, heureuseme­nt que Mr Eddy Mitchell est là pour nous faire bien rire, malgré lui. Ainsi, selon Mr Moine, David Bowie ne serait qu’un “escroc” du rock, tout juste bon à arriver “avecuneplu­medans le cul et des cheveux en pétard ”. Sans commentair­e ! MATHIEU LECLERC

Dans la vraie vie

“The Donkeys and the Elephants, The Beatles and The Stones/every body’ s on their phones (...): ours en ses have be en numbed ,we can’t enjoy the taste/ cuz everyone’ s been digitized but no one will be saved” postule King Tuff dans “Circuits In The Sand”, confirmant là notre profonde perplexité face à l’économie d’incarnatio­n du monde numérique moderne. Justifiant ce verdict : à l’époque d’iTunes, de Snapchat, de WhatsApp, de Netflix, de la 4G, des émissions en replay, eh bien les grands cataclysme­s rock n’existent plus, pour tous ceux qui de nos jours pensent être là sans y être et en même temps être là-bas alors qu’ils n’y sont pas physiqueme­nt... L’audience se sédimentan­t à l’insu du être-ensemble, de l’élan simultané, comme un programme que chacun suivrait mais dans des pièces et des états différents, pour ne pas dire opposés. Difficile d’envisager dans ces conditions la constituti­on d’une nouvelle nation rock, lieu d’incarnatio­n, de proximité et de communion. La saveur de l’instant elle-même fait les frais d’un déclasseme­nt culturel... Et, à mon avis, ce n’est pas dans le bois de ce dilettanti­sme parfaiteme­nt contre nature que cette expérience collective (Bowie et les Spiders, aussi importants que l’homme marchant sur la Lune, sur le plateau de Top Of The Pops en 1972...) est à même de perdurer. Découvrira-t-on un autre Bowie ou un autre Prince dans un avenir proche ? Pas sûr. Parce que tout est plus ouvert, qu ’“on est moins accroché à une idéologie” (et donc plus du tout à des figures tutélaires fortes ?) comme le rapportait Bertrand Burgalat le mois dernier. Ainsi, le rock de nos jours, c’est un chapiteau souterrain (chez le disquaire, à la médiathèqu­e, dans un concert, sur un site web ou dans ce journal, peu importe) où tout un chacun cultive le pré carré de son érudition. Et c’est là, dans ce ghetto, que s’exercera sans doute pour toujours le rayonnemen­t par exemple de Ty Segall, d’un John Dwyer : on n’y peut rien, c’est comme ça (on s’éprendra de la même façon plus volontiers de PNL de nos jours que de PIL, de The Voice que de The Voidz, de Lartiste que de The Artist, il faut l’accepter ; et si le son et l’imagerie du rock sont conviés, c’est par le biais d’un détourneme­nt dans la pub et la mode, eh, eh ; ou dans la rue...). La saveur du moment s’est dissipée au nom de cette avidité qui suggère que le meilleur est toujours ailleurs ou que le meilleur est toujours à venir. Balivernes. Ceci ne s’appelle pas exactement savourer l’instant... Ça n’est pas compatible avec le rock. En définitive, si le rock n’est plus, déplorons-le, une institutio­n pour le plus grand nombre, “lerock’n’roll, son importance, artistique et socié tale, déjà entrain de s’ estomper ”( édit ode novembre), c’est peut-être parce que l’institutio­n suprême aujourd’hui c’est internet, c’est pourquoi nous avons là un vrai problème, à la fois culturel (transmissi­on de relais) et éthique (de l’insatisfac­tion qui fédère, du cérémonial). L’internet a reconfigur­é la notion même de sol commun en institutio­nnalisant l’ absence, ainsi rien de tel aujourd’hui qu’un festival pour le vérifier, s’en persuader. Rien de tel qu’un festival, danslavrai­evie, pour se sentir seul au milieu des autres ; Bob Mould :“De nos jours, on assiste rarement à un concert avec cette sensation d’ ignorer si on va en ressortir vivant, ou même simplement différent, un peu ch agé ”. Et donc pour se demander, à l’heure où la documentat­ion prend le pas sur l’expérience propre, si ces gens autour, équipés de leur smartphone, sont ce qu’ils sont censés être ou bien leur propre avatar... Quoi qu’il soit, la réception semble parasitée, ce parasitage massif remettant en cause le fondement même de la grand-messe rock’n’roll, son esprit, sa spirituali­té. L’époque s’entiche de la réalité uniquement pour la fétichiser avec son téléphone. Il semble par conséquent impossible d’exister à ses yeux. Le rock, pas plus qu’un autre. Sans cette adhésion, cette disponibil­ité suffisante et nécessaire, c’est très simple : il n’y a pas de mouvement. Le cataclysme est désamorcé, caduc. L’internet, “forcela plus sombre qu’ ait jamais rencontré l’humanité” (dixit Ray Davies), “c’estle cancer,internet” (Melody Prochet, oui, cet internet- là a probableme­nt certifié l’exode de la musique à la périphérie, en en automatisa­nt l’accès comme à un livre ouvert. En la parant d’un don d’ubiquité qui n’est qu’un repoussoir à fantasmes, une entrave à sa qualité de narratrice, à la musique, un obstacle à sa capacité de jaillir, de surgir là, en se jouant du vide, afin précisémen­t de le remplir. Tel un cataclysme. Mais ainsi vont les choses. Et non, vous ne vous étonnerez pas que ce courrier soit envoyé depuis un ordinateur, R&F, pas vous ! Car au-delà de cette seule idée du progrès pour le progrès, il ne s’agit pas de se tirer une balle dans le pied non plus... Mais juste de faire la part des choses ; Neil Young : “Ames débuts, ce n’ était pas pareil: les gens de devant étaient les fans de musique, les vrais, ils connaissai­ent chaque chanson parcoeur.Lesp or tables et les richards qui peuvent se payer les meilleures places me déconcentr­ent: j’ ai l’ impression d’ être une pièce dans un musée. Ce n’ est pas bon pour la musique, qui très souvent se nourrit de l’ énergie dégagée parla salle ”. Ou ce qu’il fallait démontrer à propos de ce fameux solcommun.

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Illustrati­ons : Jampur Fraize

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