Rock & Folk

Jon Spencer

- “Spencer Sings The Hits”

INTHERED/DIFFER-ANT En plusieurs décennies d’activité, Jon Spencer a monté une poignée de groupes, mais n’avait pas encore fait le coup de l’album solo. Tâche à la fois aisée — où qu’il plante ses boots, il est facilement reconnaiss­able — et délicate : s’il a autant attendu, n’est-ce pas parce qu’il a besoin de sparring partners pour s’empêcher de tout envahir ? Avec des morceaux dont aucun ne dure deux minutes, on ne l’accusera pas de jouer ici la carte du superflu. Ni de se réinventer, puisque l’album est un concentré d’essence de pur Spencer, guitare fuzz, percussion­s fracassées, hoquètemen­ts façon Elvis Presley ou Lux Interior. On y distingue un thème : l’authentici­té, ou plutôt son absence dans la musique et l’Amérique des fausses nouvelles. Ainsi, “Fake” dégouline de vitriol et peut s’adresser à tout petit branleur sévissant dans un groupe de rock sans âme et ressemble parfois aux accusation­s que la critique a balancé sur Spencer et son Blues Explosion à leurs débuts (“Pourquoine fais-tupasquelq­uechoseden­euf?”). Il remet ça sur “Beetle Boots” avec une bonne mesure d’humour vache (“Jene veuxpasdec­esfauxtruc­s/Cessede joueravecu­ncouteauàb­eurre”), sur fond de rock garage cracra et de choeurs jubilatoir­es. La fin de l’album réserve deux belles surprises, entre l’expériment­al barré “Alien Humidity” distordu et fuzzy comme s’il passait sur une vieille radio qui crachote, et “Cape” où Spencer réalise un pastiche, à sa sauce, de Link Wray et des Cramps. Primitif, sale, sexy, “Spencer Sings The Hits” cache, sous ce titre ironique, une authentici­té, une sincérité et la passion d’un artiste qui n’a jamais cessé de creuser son sillon. En vraies ou fausses beetle boots. ISABELLE CHELLEY

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