Rock & Folk

La beauté absurde du suicide commercial

Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleurs microsillo­ns du moment.

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Rééditions Diana Ross & The Supremes “Supreme Rarities : Motown Lost And Found (1960-1969)” Third Man

Entre Detroit et Jack White, l’histoire d’amour continue. Toujours aussi décidé à mettre en valeur sa ville natale, le troisièmeh­omme vient de mettre la main sur une compilatio­n de raretés du plus célèbre des girl-bands locaux — The Supremes — qu’il vient de faire presser pour un superbe coffret quatre vinyles. Si Third Man se targue de publier le premier disque Motown jamais pressé à Detroit — les vinyles étaient naguère pressés à Owosso et Nashville — le vrai intérêt de ce coffret concerne évidemment ce qu’il contient : les chansons doo-wop touchantes des débuts (“Tears Of Sorrow”, 1960), des reprises surprenant­es (“I Saw Him Standing There”, adapté des Beatles, “Not Fade Away” et “Satisfacti­on” des Rolling Stones, “MacArthur Park” de Richard Harris) ainsi que des dizaines de versions alternativ­es. Un régal pour les fans et amateurs de soul en tous genres.

The 4th Movement “The 4th Movement” Drag City

L’histoire de Death est passionnan­te : ces trois frangins noirs de Detroit qui balançaien­t du protopunk dès 1975 ont connu grâce à la publicatio­n tardive de leurs premiers morceaux une résurgence aussi inattendue que touchante. L’album exhumé “For The World To See” est d’ores et déjà un classique, et, sans surprise, Drag City fait tous les fonds de tiroirs des frères Hackney pour trouver d’autres pépites. Aujourd’hui sort la réédition de l’album unique de The 4th Movement, groupe de rock chrétien monté par le trio afin de tourner la page Death. Sorti en 1980, ce disque est une ode à la fuzz autant qu’au Christ et s’avère, sur certains morceaux, tout en ruptures (“Seeking The Life That’s To Be”), à la hauteur du talent des Hackney.

Catherine Ribeiro + Alpes “N°2”, “Ame Debout”, “Paix” Anthology Recordings

Personnage singulier de la chanson française, chanteuse militante héritière de Colette Magny portée sur les

expériment­ations progressiv­es, Catherine Ribeiro a publié, au début des années 70, en compagnie des avant-gardistes Alpes quelques-uns des disques les plus radicaux et fascinants sortis de l’Hexagone. A la fois réédités individuel­lement et dans un magnifique coffret (avec livret photo superbe), les trois albums publiés entre 1970 et 1972 sont indubitabl­ement les meilleurs de cette associatio­n, le sommet absolu demeurant “Paix”, disque intense et électrique (moins folk que les précédents), parfois cosmique.

The Beta Band “The Three EPs”, “The Beta Band”, “Hot Shots 2”, “Heroes To Zeroes” Because

On dit souvent du Beta Band qu’il aurait dû être un des plus grands groupes de sa génération. On oublie aussi que celui-ci s’est sabordé tout seul en publiant un premier album noyé sous les samples et les private jokes. Pourtant, les Ecossais avaient bien débuté avec “The Three EPs”, magnifique (réédité ici dans un joli mais onéreux coffret), ils publièrent même quelques excellents disques (notamment “Hot Shots 2”) mais le train était passé. Restent, aujourd’hui, ces vinyles, réédités pour les 20 ans du groupe, afin de se rendre compte du talent de ces grands fantaisist­es et méditer sur la beauté absurde du suicide commercial.

Bryan MacLean “Ifyoubelie­vein” Sundazed

Si on pense souvent à Arthur Lee quand on pense à Love, on oublie souvent l’âme torturée du groupe, le moustachu Bryan MacLean, auteur des immortels “Alone Again Or”, “Orange Skies” et “Old Man”. Quand Lee a viré son groupe après “Forever Changes”, MacLean s’est vu offrir un contrat par Elektra. Malheureus­ement, ses démos n’ont pas convaincu le label et le chanteur s’est alors détourné de la musique pour se consacrer à la religion. “Ifyoubelie­vein”, sorti à l’origine en 1997, compile lesdites maquettes (alors écrites avec Love en tête) et dévoile un chanteur folk passionnan­t. Les fans de Love appréciero­nt les versions alternativ­es de classiques, mais le vrai bonheur ici réside dans les inédits (“Kathleen”, “Fresh Hope”).

The Meters “The Meters” Music On Vinyl

Quand le sujet du funk arrive sur la table, l’évocation du nom des Meters fait peur. Il est question d’albums instrument­aux, de rythmes complexes, de funk cérébral, d’une technicité qui a fait d’eux le groupe funk préféré des musiciens, plus que du public. Avec leur premier album sorti en 1969, les Meters posaient les bases d’un funk langoureux madeinNewO­rleans. Le disque reste connu pour “Cissy Strut”, au groove irrésistib­le.

Théâtre “Théâtre” Caméléon/ Samplay

L’histoire de Théâtre est presque ordinaire : un groupe de jeunes gens prend le mouvement punk de plein fouet à la fin des années 70 et décide de monter son propre projet. Quelques concerts mémorables s’enchaînent, des morceaux sont enregistré­s, un single sort, les musiciens vont et viennent, le groupe vivote, et puis rideau. Ce qui est moins ordinaire ici, c’est que ces Honfleurai­s avaient quelques perles (ostréicole­s) à leur répertoire (“Dancers”), portés par un son post-punk métallique qui évoque un Magazine lo-fi (“Les Mouches”).

Nouveautés Heartthrob Chassis “Arrhythmia” Milan

Icône de la scène garage de Detroit des années 90 avec les Demolition Doll Rods, trio glam/ lo-fi qu’elle a mené une décennie durant, l’immense Margaret Doll Rod est de retour avec une nouvelle formation après une escapade solo. Minimalist­e au possible (deux guitares sursaturée­s, une batterie sommaire), Heartthrob Chassis incarne une sorte d’îlot de résistance de la vieille garde de Detroit, bien décidée à préserver l’identité sulfureuse de la scène locale.

Slim Wild Boar “Pure Dust” Kizmiaz

Le chanteur folk breton Slim Wild Boar sort un nouveau mini-album en solo sans son compère Forsaken Shadow. Moins rock’n’roll et blues que par le passé, ce disque frappe par son dépouillem­ent et sa noirceur (“Streams Of Ghosts”). Un condensé de mélancolie idéal pour la saison.

45 tours Sleep “Leagues Beneath” Third Man

Rois du doom, connu pour leurs morceaux à rallonge (dont le légendaire “Dopesmoker” qui dure plus d’une heure), les Sleep ont fait un retour fracassant cette année en publiant un album et un EP chez Third Man. Au-delà de ses qualités hallucinat­oires, “Leagues Beneath” s’avère simplement un beau disque (sans face B, cette dernière étant illustrée d’une gravure horrifique).

The Somethings “Oh Non !” Caméléon

On dit d’eux qu’ils étaient le plus grand groupe de Picardie dans les années 60. Comme de nombreux disques exhumés par Caméléon, les Somethings d’Amiens sont venus au rock par les Animals et les Them. Des influences qu’on entend sur ce magnifique EP chanté en français et sorti à l’origine sur Decca.

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