Tricatel Universalis
JEAN-EMMANUEL DELUXE
Aussi original que son fondateur, le label Tricatel réinvente la musique avec le même esprit de traverse, voire de contradiction que Bertrand Burgalat affiche et explore depuis plus de vingt ans. Compositeur, producteur, arrangeur, c’est sous le couvre-chef — jamais cet élégant ne porterait de casquette — de patron de label que Burgalat, avec l’humour et le recul qui le caractérise, raconte à Jean-Emmanuel Deluxe, les aventures musicales et amicales qui ont construit Tricatel. Aventures musicales partagées avec toutes sortes d’artistes, des musiciens, des vidéastes, des graphistes sinon hors normes, du moins hors mainstream et aventures amicales avec les mêmes, vu que forcément, vivre ce “désastre” comme dit Burgalat, ça crée des liens. Femmes exceptionnelles, comme Ingrid Caven, Valérie Lemercier ou April March ou hommes exceptionnels, Robert Wyatt, Jonathan Coe ou Jean-Jacques Schuhl, les artistes de Tricatel ont toujours en commun l’originalité, la créativité et l’intelligence, ce qui n’a jamais été, paradoxalement, la recette pour gagner de l’argent facilement dans le music-hall mais a quand même permis, vaille que vaille, la survie du label et la sortie d’un paquet de disques formidables. Tricatel était à l’origine le nom d’un affreux industriel de malbouffe dans le chef-d’oeuvre qu’est “L’Aile Ou La Cuisse”, ce film où Coluche et de Funès, humour bonhomme pour l’un et manières impeccables pour l’autre, unissent leurs forces par amour du patrimoine culinaire français et fierté de l’ouvrage bien fait et l’on peut se demander maintenant si, plus qu’un nom marrant, ce choix de Tricatel n’annonçait pas, là, en douce le strict cahier des charges pour“une musique ... spirituelle, subtile,dosée” qu’il respecte encore et toujours.