Tropical Fuck Storm
JOYFUL NOISE/ DIFFER-ANT
Dans la famille australienne, voici les weirdos. Alors que la scène rock de l’île est plus vivace et variée que jamais — de King Gizzard à Ausmuteants en passant par Bench Press, Tame Impala, The Chats, The Stroppies et tous les héritiers d’Eddy Current Suppression Ring — et qu’elle porte en elle des valeurs d’avantgardisme et de radicalité, voici qu’un groupe met tout le monde à l’amende. Formé par deux membres des Drones qui ont décidé de quitter Melbourne pour se planquer dans l’outback afin d’y laisser libre-court à leur imagination (et se libérer du poids de ce groupe populaire aux Antipodes), Tropical Fuck Storm est un groupe insaisissable, déstabilisant. A la première écoute, le projet navigue entre brouhaha et capharnaüm, puis, une ligne mélodique accroche l’oreille et l’évidence apparaît. Derrière le chant mi-parlé mi-scandé de Gareth Liddiard, les rythmes incertains et les instrumentations louches, se cachent des chansons magnifiques. La musique de Tropical Fuck Storm s’apparente parfois à une sorte de punk lent (à l’image de ce “Paradise” qui sonne comme une explosion en slow motion), à de la pop girly passée à la moulinette post-punk (“Who’s My Eugene?”) ou à de l’afrobeat joué par des blancs-becs défoncés (“Braindrops”). Fil conducteur de l’album, la guitare déglinguée d’Erica Dunn (vue aussi chez les excellents Mod Con) maintient l’album dans un climat d’apesanteur permanent et, avec sa voix déchirée, Liddiard n’oublie pas de temps à autre de nous rappeler qu’il vient du pays de Nick Cave sur des chansons tristes et ténébreuses (“Maria 63”).
✪✪✪✪
ERIC DELSART