Belles chansons aux titres imprononçables
Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleurs microsillons du moment.
Suicide Rééditions “Suicide” BMG/ Mute
Souvent réédité en vinyle depuis sa sortie initiale en 1977, le premier album des punks électroniques de Suicide, revient dans une édition deluxe orné d’un sticker où figure la note d’intention des labels : célébrer l’album en tant que forme artistique. D’où ce magnifique objet, contenant un livret de 12 pages avec les textes des morceaux ainsi que plusieurs essais sur l’impact et l’influence de cet album avant-gardiste qui a prouvé que les punks n’avaient pas besoin de guitares. Mais, l’important est ailleurs, car, si l’emballage est joli, l’album a été brillamment remasterisé. La musique mécanique qui émane des sillons de ce disque vinyle rouge sang se montre toujours aussi vénéneuse et radicale qu’à sa sortie.
Opus Minor “Opus Minor” Monster Melodies
Toujours plus loin dans l’exploration des scènes underground françaises du début des années 70, Monster Melodies publie les enregistrements inédits d’Opus Minor, groupe parisien sous influence Cream/ Led Zeppelin, actif entre 1970 et 1973. Chantant en anglais et en français, le quintette n’a jamais rien publié de son vivant, ce qui est dommage étant donné le talent qu’il manifeste ici. Cette édition propose deux magnifiques posters, une carte postale qui reproduit un flyer de l’époque, le disque lui-même étant coloré.
Sigur Rós “Agaetis Byrjun” Krunk
Ah, Sigur Rós, son chanteur à voix d’ange, ses pochettes énigmatiques, ses belles chansons aux titres imprononçables.
Il y a vingt ans sortait “Agaetis Byrjun”, disque qui a placé le groupe islandais sur la carte du rock. Celui-ci a percé au moment où Radiohead était à son apogée et où cette forme de pop lyrique était l’exemple à suivre. Pour l’anniversaire de la sortie de cet album devenu culte, plusieurs éditions emplies de bonus divers et variés ont vu le jour. La version vinyle propose une jolie relecture de la pochette d’origine (en négatif) et contient un bon de téléchargement permettant d’écouter de nombreuses pistes inédites (faces B, démos, album live).
The Dandy Warhols “...The Dandy Warhols Come Down” Capitol/ Music On Vinyl
Voici un album qui prend de la valeur avec chaque année qui passe, surtout au regard des productions récentes du groupe. “Come Down”, deuxième album studio du gang de Portland, est souvent l’album préféré des fans des Dandys, car plus trippant et mystérieux que son tubesque successeur “Thirteen Tales From Urban Bohemia”. Des morceaux tels que “Be-In”, “Boys Better”, “Not If You Were The Last Junkie On Earth”, “Everyday Should Be A Holiday” sont devenus des classiques au fil des années. Cet étonnant mélange de shoegaze et de rock garage psychédélique revient pour la première fois depuis sa parution initiale en (double) vinyle (en 1997). Il était temps.
Placebo “Placebo”, “Without You I’m Nothing”, “Black Market Music”, “Sleeping With Ghosts”, “Meds” Elevator Music
Réédités il y a quelques années sur des vinyles colorés à la qualité parfois douteuse, les albums de Placebo font leur retour dans les bacs. “Without You I’m Nothing”, dont le pressage avait été le plus critiqué, semble bénéficier de cette campagne, et “Pure Morning” retrouve la puissance qui en a fait un des morceaux les plus emblématiques de la fin des années 90.
Bien sûr, de cette collection d’albums, seuls les deux premiers sont essentiels, pour leur mélange de rock alternatif et de glam qui a accouché de titres marquants (“Teenage Angst”, “Nancy Boy”, “You Don’t Care About Us”). Ensuite, les choses deviennent moins intéressantes, malgré quelques coups d’éclat (“The Bitter End”).
The Montgolfier Brothers “Seventeen Stars” CTR
Qui se souvient des Montgolfier Brothers ? Leur premier album, sorti en 1999, n’a pas exactement eu le même impact que celui de Sigur Rós, malgré une qualité évidente dès la première écoute. Adoubé par Alan McGee (qui avait aimé l’album au point de le rééditer en 2000 avec son label Poptones), ce duo britannique propose une musique moins atmosphérique que son nom pourrait indiquer. On est dans la fragilité, la douceur, avec un chant presque parlé, quelques arpèges et un tapis d’orchestrations qui citent Michel Legrand. La réédition de ce disque est une des bonnes surprises de l’été.
45 tours Trumpets Of Consciousness “Approximate”
Le Pop Club/ Echo Orange/ Urgence Disk
En 2016, Trumpets Of Consciousness, projet pop de Thibauld Labey, avait séduit avec son approche inspirée des grands artisans pop des années 60. L’artiste tente la même chose avec un nouvel album aux influences plus progressives et aux orchestrations toujours aussi léchées. On est souvent plus proche d’Aquaserge (“C’est Vraiment Très Intéressant”) ou d’ELO (“Stephanie Saturday”) que des Beatles.
Geoffrey Lolli “Chiaroscuro — The Truth And Its Shadow” Specific
La pochette de cet album composé par le Messin Geoffrey Lolli annonce la couleur et ne ment pas : “Library music for a cinematic journey”. Ce qu’on entend ici ? Des instrumentaux magnifiques, sous influence Morricone (“La Clessidra”), avec des lignes de basse insistantes, des arpèges délicats et des nappes de synthétiseurs (“Gioco Di Spia”). Cette BO imaginaire comporte ainsi ses passages apaisés, ses pistes anxiogènes et ses moments plus speed nourris de guitares funky et de piano jazz (“La Crociera Dell’Amore”).
Nouveautés Mush “Induction Party” Memphis Industries
Attention, groupe à suivre. Après avoir sorti quelques singles sur des petits labels (on recommande le fabuleux “Alternate Facts”), Mush sort son deuxième EP et se place parmi les groupes anglais les plus enthousiasmants du moment. Quelque part entre Television, Gang Of Four et Captain Beefheart, le quartette écrit des chansons post-punk aux paroles pince-sans-rire (“Litvinenko”, “Operation Vaken”) et aux rythmes déroutants. L’Angleterre a trouvé la réponse à Parquet Courts, en plus hirsute et déglingué.
David Bowie “Space Oddity” Parlophone
Diffusée en direct par la BBC lors de l’alunissage d’Apollo 11 en 1969, “Space Oddity” ressort dans une édition spéciale pour célébrer l’anniversaire de ce moment historique. Deux versions du single (avec notamment un remix proposé par le producteur Tony Visconti en personne) ainsi que quelques goodies (dont un poster) sont inclus dans ce magnifique coffret.
Les Playboys “J’aime Pas” Ave The Sound
Légende de la scène garage rock niçoise, les fringants Playboys reviennent avec quatre inédits de leur concoction pour ce premier EP depuis 2015. Comme toujours chez eux, c’est élégant, ça joue bien, et comme Jim Diamond n’est pas loin, la fuzz explose dans les haut-parleurs (“Dis-Lui Non”).
Revizors “Airport” How Much
Assemblage d’ex-membres de Blutt et des Greensliders, Revizors sont des vétérans de la scène garage parisienne qui jouent une forme de power pop sous influence sixties à la française. Pour son premier single, le trio perpétue une tradition du genre : le morceau de la face B (“Un Ange Passe”) est le plus intéressant de la paire.