Last Train
“The Big Picture” DEAF ROCK/ CAROLINE
L’entrée en matière est saisissante : avec un mid tempo lascif, un mur de guitares et un chant incantatoire, “All Alone” instaure d’emblée une tension qui ne se démentira que rarement par la suite. Dans la foulée, “Scars” ouvre d’autres perspectives en alternant pauses délicates, assez pop, et poussées d’énervement. Cette variation de climats se trouve confirmée avec “On Our Knees”, qui travaille cette alternance sur la longueur (plus de huit minutes), après une lente montée en puissance. Pour son second album, Last Train n’a pas choisi la facilité (asseoir sa réputation fougueuse) et préfère relever un pari risqué et ambitieux : affirmer sa musicalité et son goût d’atmosphères différentes tout en recherchant une intensité permanente. Avec un aplomb conquérant, le quartette alsacien s’aventure au-delà de son pré carré : il ose prendre son temps (les dix morceaux évoluent souvent entre quatre et cinq minutes) et se risque, avec brio, dans une longue mélopée déchirée et envoûtante de plus de dix minutes (“The Big Picture”), il s’offre un intermède au piano classique, tente une ballade qui révèle les facilités de son chanteur, et reste fidèle à ses fondamentaux très rock à l’occasion d’accélérations de tempo (“I Only Bet On Myself”) ou de flambées obsédantes (“Disappointed”). C’est une révélation : on ne savait pas le groupe capable d’une telle maîtrise des ambiances, on ne lui connaissait pas non plus une telle puissance évocatrice. Serait-il la relève d’un rock français émotionnel et exigeant ? ✪✪✪✪