Un disque qui ne s’envisage qu’en vinyle
Rééditions, nouveautés et 45 tours : le point sur les meilleurs microsillons du moment.
Rééditions Todd Rundgren “Runt” “Something/ Anything?” Music On Vinyl
C’est un des grands projets de Music On Vinyl pour 2019 et 2020 : rééditer l’oeuvre de Todd Rundgren en solo et avec Utopia. Cette vaste campagne débute avec deux des plus beaux albums de l’excentrique chanteur. “Runt”, sorti en 1970, est le premier album enregistré par Rundgren après son départ de The Nazz. L’Américain y dévoilait alors un visage romantique, éloigné de son image de rocker psychédélique. Les ballades composées au piano sont nombreuses, les élans lyriques aussi (“We Gotta Get You A Woman”). Nul doute qu’il s’agit là d’un des disques de chevet des Lemon Twigs, mais si “Runt” est passionnant, il n’atteint toutefois pas le niveau d’excellence et de sophistication de “Something/ Anything?”, double album enregistré en intégralité par son auteur. Un chef-d’oeuvre authentique empli de chansons pop parfaites (“I Saw The Light”, “It Takes Two To Tango”).
Creedence Clearwater Revival “Live At Woodstock” Craft
Après 50 ans au purgatoire, le concert de Creedence Clearwater Revival à Woodstock a enfin droit à sa publication et force est de constater que les marchands de bootlegs vont devoir fermer boutique. Côté pochette, on verse dans le minimalisme, mais l’important se situe dans les sillons de ce double vinyle qui aurait pu
(dû ?) changer l’histoire du groupe si John Fogerty n’avait opposé son veto à toute diffusion de cette performance. Si le premier disque montre le groupe à l’aise sur ses titres les plus percutants (“Born On The Bayou”, où la voix de Fogerty est sublime), le frisson naît de ce deuxième disque qui fait basculer la prestation dans une autre dimension avec deux morceaux de bravoure étirés sur 10 minutes (“Keep On Choogling”, “Suzie Q”).
Blue Öyster Cult “Blue Öyster Cult” Music On Vinyl
Bien avant le punk et loin de la surenchère de Led Zeppelin et ses suiveurs, ces fameux New-Yorkais incarnaient, au début des années 70, une version tendue et directe du hard rock (“Transmaniacon MC”). Plus louche et menaçant que puissant, le premier album du groupe, paru en 1972, a ainsi bien mieux vieilli que nombre de ses contemporains. Avec sa pochette magnifique, c’est un disque qui ne s’envisage qu’en vinyle.
Pink Floyd “The Division Bell” Pink Floyd
En préambule à un coffret qui va retracer les trente (pas inoubliables) dernières années du groupe, Pink Floyd réédite “The Division Bell” sur vinyle bleu pour célébrer les 25 ans de cet album. A sa sortie, le disque avait recueilli de nombreuses louanges, notamment parce qu’il redressait la barre après un “A Momentary Lapse Of Reason” calamiteux, et qu’il annonçait un retour sur scène du groupe. Aujourd’hui, malgré un tube aux élans nostalgiques (“High Hopes”), on peine à s’enflammer pour ce “The Division Bell” empli de guitare espagnole. Reste que cette réédition est magnifique, comme toujours avec Pink Floyd.
Oasis “Definitely Maybe” Big Brother/ Pias
Lui aussi fête son 25ème anniversaire, mais il a bien plus marqué son époque. Le premier album d’Oasis, disque générationnel gavé de classiques intemporels (“Supersonic”, “Live Forever”, “Shakermaker”), revient sur double vinyle argenté et, pour la première fois, en picture-disc. De quoi consoler les fans, traumatisés par la brouille de la fratrie Gallagher et les discutables travaux de Noel.
Tunng “This Is Tunng... Magpie Bites And Other Cuts” Full Time Hobby/ PIAS
Dans les livres d’histoires, on lira sans doute dans 50 ans que les anglais Tunng ont été les inventeurs de la folktronica, mouvement musical du début des années 2000 durant lequel des musiciens bricoleurs se sont mis en tête de mêler sonorités électroniques et guitares acoustiques. Facteurs d’instruments insolites, les membres de Tunng sont de doux hippies portés sur la mélodie, et cette anthologie, qui regroupe sur un double vinyle transparent des morceaux disséminés à droite et à gauche (issus de singles et compilations, ou tout simplement inédits), le démontre à merveille.
Michael Rother “Flammende Herzen” “Sterntaler” “Katzenmusik” “Fernwärme”
Groenland
Après avoir tranquillement révolutionné la musique occidentale au sein de Neu!, le guitariste Michael Rother s’est lancé, en 1977, dans une carrière solo moins documentée mais également passionnante. Quatre albums sortis entre 1977 et 1981 sont à nouveau disponibles. “Flammende Herzen” est sans doute le plus accessible aux amateurs de Neu! avec ses boucles et ses lignes de guitare emplies d’echo. Tout aussi recommandés, les suivants trahissent toutefois l’appétance de Rother pour les synthés baveux.
Nouveautés Bill Callahan “Live At Third Man Records” Third Man
Difficile de suivre le rythme de publication des albums live enregistrés à Third Man mais une chose est sûre : la qualité est toujours au rendez-vous. Et parfois, comme sur ce concert de Bill Callahan, un petit miracle se produit. Le leader de Smog a rarement été aussi bien saisi qu’ici, sa performance sur des chansons telles que “Drover” est magnifique.
Jacco Gardner “Fading Cosmos” Full Time Hobby/ PIAS
Sur son troisième album, “Somnium”, Jacco Gardner a effectué un tournant radical en délaissant les chansons pop pour des compositions instrumentales. L’EP “Fading Cosmos”, composé de deux rêveries électroniques de huit minutes, poursuit dans cette veine méditative. Doux, triste, et beau.
45 tours The No-Things “Miracle Man” Cargo
Le groupe garage le plus sale d’Edimbourg est de retour avec un 45 tours délicieusement lo-fi et déglingué. Difficile de ne pas tomber sous le charme du “Sleeping Pills Are For Bad Boys” de ces mauvais garçons autoproclamés.
Red Mass “Bored”
Sympathy For The Record Industry
Quintette punk déviant venu du Canada, Red Mass fait preuve de bon goût en reprenant sur son dernier 45 tours un morceau de Destroy All Monsters (groupe de Detroit mené par Ron Asheton et Niagara), “Bored”, un classique, traité avec respect, et adoubé par Sympathy For The Record Industry.
The Hives “I’m Alive” Third Man
Après quatre ans de silence, un nouveau single des Hives est forcément un événement, surtout si c’est leur ami Jack White qui le publie. “I’m Alive” déçoit un peu, hélas. L’autre morceau de cette double face A, “Good Samaritan”, sonne comme du Hives pur jus, et annonce un retour tonitruant.
Wild Zeros/ Proto Idiot “Jukebox Serie” Permanent Freak
Le label malouin Permanent Freak tente une série taillée pour les jukebox avec un EP à gros trou. Deux faces, deux groupes garage, deux morceaux chacun. Les Bordelais de Wild Zeros font bonne figure mais ce sont les Anglais de Proto Idiot qui emportent l’affaire avec “New Ways Of Seeing”.