Pat Metheny
NONESUCH/ WARNER
On va être franc : on n’a pas tous
les disques (il en a publié une cinquantaine) sur lesquels on peut lire le nom de Pat Metheny. Dont on parle dès que c’est possible ; la dernière fois, à l’occasion de la sortie d’un DVD. En 2020, on retrouve le guitariste américain dont la carrière, à l’image de la vie des grands jazzmen, est un long fleuve sans rives (une sorte de mer, donc), voguant avec son Unity Band, mais pas seulement. Car s’il doit d’abord sa très haute tenue à Gwilym Simcock (piano), Linda May Han Oh (basse) et Antonio Sanchez (batterie), lâchés comme des chevaux sauvages dans l’arrangement de compositions que Metheny a toutes signées, “From This Place” possède un lustre incomparable : des cordes jouées à la main par le
Hollywood Studio Symphony dirigé par Joel McNeely, un de ces chefs d’orchestre capables de donner à une coquille de noix l’allure d’une caravelle. Dernier des dix titres, “Love May Take A While”, parfaite illustration de cette symbiose, aurait trouvé sa place dans n’importe quel film de Sydney Pollack. “America Undefined” et “Sixty-Six” sont les deux morceaux les plus longs de l’album et, naturellement, prétextes à des cavalcades, des ralentis, des plans-séquences dont certains pourraient être dilués dans le couchant. “You Are”, calme puis tempétueux, accompagnerait redoutablement bien un reportage sur la fonte des icebergs, tandis que les sinuosités de “Same River”, arc-bouté sur un impeccable riff de basse, se font à peine sentir. Seule chanson ici, mais qui donne son titre au disque, “From This Place” est servie par une Meshell Ndegeocello à couper le souffle, et pas seulement dans le couplet où elle affirme : “D’ici, je dis que je ne peux pas respirer.” ✪✪✪
JÉRÔME SOLIGNY