Chicken Diamond
“Bad Man” BEAST/ CARGO
A six albums, on peut considérer
qu’on déploie une oeuvre, qu’on vient pour durer et laisser un nom dans le purgatoire du rock français. Chicken Diamond ne rate généralement pas grand-chose mais, s’il y existe un domaine où il est infaillible, c’est bien le visuel de ses pochettes. Celle-ci pose tout de suite son monogramme et laisse deviner une intrigue complète, une architecture incassable. L’enragé du crassier a soigné ses cordes vocales et ses beats. On trouve encore le chiffre de la bête vomi sur un écorché de
hill country, les abdos sont toujours comprimés à mort, mais le chant s’est coloré. Le suprême des basses-cours attrape le grain d’Iggy Pop ici, de Johnny Rotten là, l’aigu cinglant de Ian Carnochan (celui des Vibrators) ailleurs. Ses samples de batterie, trafiqués et injectés dans la boîte à rythmes, machinent un jeu de jambes complexe qui entrave les chansons plus qu’il ne les propulse, et les transforme en rounds de boxe (par contre, la basse est une vraie). Le blunk bestial des premiers temps a évolué. Toujours ces contrastes T-model-fordiens, cette effervescence garage, punk, stoner, mais aussi quelques airs qu’on pourrait fredonner, car le terrifiant gallus
gallus domesticus, d’un allotrope de carbone paré, a rendu un peu de sa cruauté originelle. Il a même gravé une ballade crépusculaire (une ballade !) sur un ravissant arpège en picking, seule reprise de l’album, “Bad Man” des Oblivians. Il ne croise pas les guitares cette fois, n’en jouant qu’une par titre, l’Harmony Rocket ou la Kawai, pour une attaque plus directe, plus conforme à ce qu’il envoie sur scène. Que de mots pour dire qu’on prend encore une bonne mandale dans la poire. ✪✪✪✪
CHRISTIAN CASONI