Rock & Folk

Bobby Conn

- JEAN-EMMANUEL DELUXE

“Recovery” TAPETE/ BIGWAX

Mais qu’a donc fabriqué Bobby Conn, le grand escogriffe de Chicago ? Après huit ans d’absence, celui qui fut le poulain du très branché label Thrill Jockey a trouvé refuge chez les Allemands de Tapete Records. Conn, avec son épouse Monica BouBou, offre, avec ce “Recovery”, une sorte de manifeste post-post-tout qui, au final, pourrait bien être la photograph­ie de la résistance aux années Trump. Voici venu le grand satiriste de son époque, quelque part entre le Biff Rose des débuts et George Carlin. Ou encore une sorte de mélange bizarre entre Jobriath et Lenny Bruce. Trop subtil pour donner des leçons, Conn n’en reste pas moins conscient des manquement­s de son pays quand il confie : “J’ai commencé à travailler sur ce disque il y a environ quatre ans. Je songeais à l’obsession américaine vis-à-vis du développem­ent et des soins personnels en tant que substitut cruel et bon marché à la fraternité. Un concept qui récompense ceux qui ont de l’argent pour s’aider euxmêmes et blâme ceux qui n’en font pas

assez.” Comme tous les grands, de Randy Newman à Ray Davies, Bobby Conn est un fin chroniqueu­r de la société. Cependant, qu’on se rassure, “Recovery”, tour à tour glam, pop, funk, électro et punk, comporte des chansons suffisamme­nt accrocheus­es pour faire bouger les plus statiques. Dans “Disposable Future”, Conn chante qu’il est coincé dans les années 80. Une sorte de constat de la chute des idéaux de la contre-culture depuis les années Reagan dont Trump serait le remake en pire. Le futur était hier pourrait être la morale de cet album roboratif à la lucidité glaçante. ✪✪✪

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