Sans passer par les sempiternels zombies décatis
La Plateforme
Sur Netflix, la chaîne qui ne passe quasiment jamais de films d’avant 2001, débarquent, de temps à autre, de véritables bizarreries. Comme “La Plateforme” de l’Espagnol Galder Gaztelu-Urrutia, film d’horreur barré où deux taulards, emprisonnés dans une tour, sont nourris quotidiennement par des victuailles amenées par une dalle qui descend progressivement les étages. Les premiers servis (taulards du dernier étage) défavorisant les derniers (taulards du rez-dechaussée). Seul moyen de s’en sortir : gravir les étages ! Métaphore sur le comportement humain sous pression (avec cannibalisme à la clé) et sur les méfaits du capitalisme (vaut-il mieux se nourrir correctement pour en faire profiter les autres ou avaler toute la bouffe sans tenir compte de son prochain ?), “La Plateforme” fonctionne à plein dans le glauque et l’interrogation. Rappelant certaines franchises de films d’horreur ou de science-fiction aux huis clos gore (“Saw”) ou étouffant (“Cube”), “La Plateforme” témoigne d’une envie de renouveler le genre sans passer par les sempiternels zombies décatis, serial killers cabots et autre vampires aux canines usées (disponible sur Netflix).
The Informer
Tout comme Netflix, mais au compte gouttes, Amazon propose régulièrement des longs métrages de genre gentiment burnés. Comme “The Informer” de Andrea Di Stefano, pur polar d’action où un ancien soldat des forces spéciales, obligé malgré lui de devenir informateur pour le FBI, est infiltré comme taupe dans une prison afin de démanteler un trafic de drogue géré par la mafia polonaise. Une intrigue certes vue
10 000 fois mais qui, contrairement à d’autres séries B de genre mal fichues, mal écrites et mal jouées (comme les 22 dernières années de la filmographie de Steven Seagal) joue ici davantage la carte de la subtilité. A travers le jeu macho et angoissé de son acteur principal (le bellâtre suédois Joel Kinnaman, un des durs à cuire de “Suicide Squad”), comme dans ses multiples rebondissements et coups de théâtre explosifs (surtout la fin, assez teigneuse). Comme chez Scorsese, le film dépeint avec un certain réalisme les rapports de force qui existent entre infiltrés, flics ripoux et flics sincères (disponible sur Amazon Prime Video).
Bloodshot
Budgété à 45 millions dollars, ce miniblockbuster coproduit entre la Chine et Hollywood devait initialement sortir sur les grands écrans ce printemps. Coronavirus oblige, le premier long métrage de Dave Wilson (jusque là spécialisé dans les effets spéciaux de “Star Wars” et “Avengers”) sort donc directement en VOD. Ce qui n’est pas un mal puisqu’on aurait douté de son éventuel succès au box office, qui plus est dans des salles fermées. Conçu sur mesure pour ce bonhomme Michelin humain qu’est Vin Diesel, “Bloodshot” est une sorte de version kitch de “Terminator” où l’acteur, dans la peau tannée d’un soldat tué en mission, est ramené à la vie par une entreprise douteuse qui le transforme en véritable machine à tuer. Avec, c’est dans la charte, des gunfights endiablés et des courses poursuites sans fin dans un monde futuriste numérisé comme un jeu de baston de Playstation 4. Mais avec, au passage, quelques séquences involontairement cartoonesques. Notamment cette invraisemblable baston entre Vin Diesel et le méchant dans les ascenseurs extérieurs d’une gigantesque tour. On n’est pas loin d’un dessin animé de Bip Bip et Vil Coyote ! Diesel espérait probablement faire autant de succès avec ce nanar (plaisant, cela dit) que dans ses “Fast And Furious”, la seule franchise qui l’amène régulièrement en haut du box office. Parce que, hélas pour lui, son jeu monolithique est finalement plus proche d’un robot que de Marlon Brando ou Robert De Niro. Ça tombe bien, c’est tout ce qu’on lui demande ! (disponible sur les principaux sites de VOD)
Chez Moi
Sur Netflix, l’Espagne a de plus en plus la cote. Probablement boosté par le succès mondial de la série du moment (“La Casa De Papel”, qui vient d’entamer sa quatrième saison dans le braquage, les flingues et la bonne humeur), les longs métrages assurent. Ainsi, après avoir posé l’oeil droit sur “La Plateforme”, on posera le gauche sur le très tendu “Chez Moi”. Un thriller psychologique intense dans lequel un publicitaire au chômage se met à espionner les nouveaux locataires du domicile luxueux qu’il occupait avant avec sa femme. Son but : récupérer tout ce qui faisait le bonheur de sa vie : son job, son doux logis et son honneur. Par le biais de coups de théâtre diaboliques et vicelards, on s’attache fortement à cet homme perdu qui passe de l’état de cadre moyen cool à ordure totale, prête à tout pour garder intact son train de vie. Ce qui permet au passage aux deux metteurs en scène (David et Alex Pastor, sortes de frères Coen ibériques) de dresser une métaphore réussie sur les aléas de la grande crise économique espagnole de 2012 (disponible sur Netflix).o