Tiña
avant de virer à mi-chemin sur un fougueux instrumental, alliant rythmique kraut implacable et guitares space rock. La face B, un peu moins dense, propose tout de même l’excellente “Blind To Vines”, dotée d’une mélodie oblique et d’un final frénétique, et le déchaînement de “End Returning”, imprévisible et fracassante bastonnade de plus de sept minutes. Voilà qui clôt parfaitement ce troisième volet rageur et musculeux qui ne déparera pas dans la discographie sans faute du lourd trio. ✪✪✪1/2 (spécifier “ex-” ne rime plus à grandchose). “Grand Plan” est paru entre les deux confinements (français) et, même si le givre a commencé à blanchir les toits le matin, il accompagnera idéalement le moindre rayon de soleil de cette fin d’année. Car le bonhomme fait dans la pop qui réchauffe le coeur et l’âme, celle que, oui, à l’époque de Wings, McCartney manipulait mieux que personne. Songwriter au sens noble de l’anglicisme (c’est-à-dire que ses textes ont de l’importance : “Actor With A Loaded Gun”, “Hit Your Limit”...), il est un mélodiste furieusement inspiré, qui sait qu’une bonne chanson ne l’est pas sans cocon pour s’épanouir. Ici, les arrangements teintés de nostalgie (comme Phoenix au début...) sont cruciaux, tout comme les harmonies vocales et, au hasard, le son, vintage, de la batterie. Génialement agencées et calibrées, “Yesterday”, “Stay
In LA” ou “Rain” sont d’un autre temps (on pense évidemment aux Lightning Seeds) et peut-être, rêver n’est pas encore interdit, de celui qu’on n’a pas vécu. ✪✪✪✪ JéRôME SOLIGNY
“Positive Mental Health Music”
Tous vêtus de rose, avec un chanteur perpétuellement couvert d’un Stetson cheap de la même couleur, qui semble sorti tout droit d’un enterrement de vie de jeune fille trop arrosé, le quintette londonien Tiña se présente comme une bande d’excentriques. Pourtant, dans le dossier de presse du groupe, il est surtout question d’anxiété, de dépression et d’un disque cathartique pour le chanteur Josh Loftin, qui écrit et compose l’essentiel de ce “Positive Mental Health Music” au titre équivoque. L’écoute de l’album ne fait qu’entretenir la confusion : disque reposé empli de mélodies mémorables, le premier album de Tiña est une merveille de pop dépouillée qui évoque les moments les plus calmes de Pavement (“Growing In Age”), le folk lo-fi des Woods des débuts (“Closest Shave”), la pop psychédélique des enfants biberonnés au son de 1967-68 (“I Feel Fine”, très “Pictures Of Matchstick Men” dans l’esprit), le tout saupoudré de la grâce impertinente du jeune Beck (“New Boi”). Le style de Tiña pourrait se résumer à cela : des mélodies pop aux arpèges cristallins et à l’orgue omniprésent, portées par un frontman aussi désabusé que sarcastique, mais indéniablement magnétique. Le groupe possède, avec le chanteur Josh Loftin, un personnage fascinant. Avec une décontraction désarmante, il narre sans fard, mais avec beaucoup de poésie, ses tourments avec un sens de l’autodérision permanent. Un mec un peu perché qui n’hésite pas à chanter en falsetto (et avec talent, sur des réussites telles que “Rooster” ou “People”) et qui est manifestement obsédé par la musique des années 1990. Avec son groupe, il vient de publier une des belles surprises de cette fin d’année. ✪✪✪✪