Jusqu’à ce que mort s’ensuive
Bronx
Bronx
De polar en polar, l’acteur-réalisateur Olivier Marchal rend des hommages mi-nostalgiques, mi-désespérés à son traumatique passé de flic. Avec du spleen déchirant, des coups bas et des allers-retours houleux entre le bien et le mal, ses films allant de l’efficacité fun (“36 Quai Des Orfèvres”) à la caricature forcenée (la première saison de “Braquo”). Avec “Bronx”, ambitieuse production Gaumont
His House conçue pour les salles, mais refourguée au dernier moment à Netflix pour cause de coronavirus, Marchal remet les pieds dans ses propres pas obsessionnels. Soit des règlements de comptes sans fin entre flics au bout du rouleau et voyous sans pitié du côté de Marseille, la capitale française du gunfight. Olivier Marchal y allant à fond dans le nihilisme absolu quand quelques flics retors de l’antigang n’ont plus d’autre choix que passer du mauvais côté de la loi. Et ce jusqu’à ce que mort s’ensuive. Malgré son accumulation d’habituels clichés (tous les personnages, sont déchirés par la vie), “Bronx” réussit à distraire via un esprit teigneux hérité d’un certain cinéma d’action américain dont Marchal est fan. Quant aux acteurs bankables comme Jean Reno et Gérard Lanvin, ils se contentent ici de seconds rôles pour laisser la place à des comédiens à trogne comme le cascadeur David Belle ou le rapeur Kaaris, le meilleur ami de Booba comme chacun sait (en diffusion sur Netflix).
His House
Si Netflix déverse régulièrement une grosse quantité de films d’horreur plus ou moins plaisants (ou plus ou moins nuls), il arrive de temps à autre de tomber sur de la terreur sans gras. Comme l’incroyable “Le Rituel”, qui immerge littéralement le spectateur dans un trip sabbatique au beau milieu d’une forêt satanique. Ou comme le tout frais “His House”, premier longmétrage d’un certain Remi Weekes, qui mixe habilement cauchemars paranoïaques et métaphore sociale sur les affres de l’immigration. Ici, le parcours compliqué d’un couple de réfugiés qui est accueilli en Angleterre, et logé dans une maison en attendant d’obtenir ses papiers. Problème : l’habitation aux murs délabrés semble être hantée. Visiblement sous influence du “Locataire” de Roman Polanski, “His House” jongle avec une certaine terreur interrogative sur la paranoïa angoissante. Avec apparitions spectrales et voix sorties des murs, comme si ces manifestations flippantes représentaient les angoisses du couple à l’esprit gangrené par la guerre qu’ils ont vécue au Soudan, et par la mort de leur petite fille noyée durant leur traversée en mer. “His House” fait actuellement un buzz mérité auprès des amateurs du genre (en diffusion sur Netflix).
Apparence Trompeuse
Apparence trompeuse
Après avoir inondé les salles du monde entier à coups de séries B d’horreur rapportant systématiquement le triple de leur faible coût de production (généralement moins d’un million de dollars), le producteur Jason Blum passe maintenant ses deals avec Amazon. Huit films de genre étiquetés Blumhouse débarquent donc d’un coup sur le site le plus détesté des petits commerçants. Dont un au moins retient l’attention : “The Lie” — alias “Apparence Trompeuse” en français — de Veena Sud. Un semi huis clos au cours duquel des parents, affolés par un meurtre commis par leur fille adolescente, sont pris dans un engrenage infernal pour éviter la prison à cette dernière. Si la tension et l’angoisse constantes d’ “Apparence Trompeuse” fonctionnent, c’est surtout grâce à sa direction d’acteurs. Le couple de parents, formidablement interprétés par Peter Sarsgaard et Mireille Enos, faisant passer avec une émotion tenace, doutes, affolements et improvisations à l’arrache pour éviter que sa progéniture ne se retrouve accusée du crime qu’elle a commis. Bien, bien, bien tendu (en diffusion sur Amazon Prime Video) !
Zeroville
Drôle de gars ce James Franco ! En vingt ans de carrière, il tient pas moins de cent cinquante rôles sur les petits et grands écrans, jonglant entre séries réputées (“The Deuce”), blockbusters potables (les “Spiderman” de Sam Raimi), films d’auteur et autres courtsmétrages nettement plus intimistes. Dont une quarantaine qu’il a trouvé le temps de réaliser ! Et dont certains dévoilent sa fascination fétichiste envers des films cultes. Voir “Interior. Leather Bar.”, étrange essai où il reproduit
Zeroville le tournage du “Cruising” de William Friedkin. Ou ce touchant “Zeroville” dans lequel il s’auto-dirige dans la peau d’un homme qui, sous l’emprise psychique d’un classique qu’il vénère (“Une Place Au Soleil” de George Stevens, avec le duo mythique Elizabeth Taylor/ Montgomery Clift) se met en tête de faire carrière à Hollywood. Si “Zeroville” peut parfois agacer par son côté pensum/ auteurisant/ nombriliste (une marque de fabrique chez James Franco), on lui sait gré de mettre en parallèle l’industrie sans âme d’un certain cinéma hollywoodien contemporain à celle, nettement plus poétique et élégante, des années 1940 à 1970 (disponible en VOD sur FilmoTV).o