Cabaret Voltaire
“Shadow Of Fear” MUTE/ PIAS
Cabaret Voltaire, groupe de Sheffield dont le nom est celui du café dadaïste fondé à Zurich en 1916 (et toujours ouvert en 2020), a déployé ses machines et son discours dissident dès 1974. Vétéran de la scène electro, et précurseur de ce qui deviendra la musique industrielle avec l’avènement de Throbbing Gristle, Richard H Kirk, désormais seul membre du collectif fantôme, ne désarme pas avec ce quinzième album studio qui réutilise les mêmes ingrédients que sur les classiques “Nag, Nag, Nag” ou “Drinking Gasoline” : des sons distordus, des voix trafiquées, des rythmiques brutales et synthétiques. Enregistré au studio Western Works comme tous ses prédécesseurs,
“Shadow Of Fear” n’a pas à rougir de la comparaison avec le reste de la discographie de Cabaret Voltaire.
Si le groupe avait cessé toute activité depuis “The Conversation”, le précédent LP sorti au siècle dernier (1994), sa présence au festival Berlin Atonal en 2014 annonçait sa renaissance après vingt ans de silence. Six ans plus tard, c’est le come-back dans les bacs avec ces huit titres rétro-futuristes. De “Vasto”, le premier single, au frénétique “Papa Nine Zero Delta United”, le capitaine Kirk retrouve le son anxiogène du Cabaret, bien en phase avec l’air du temps paranoïaque et complotiste. “J’ai fini l’album juste au moment où cette situation bizarre a commencé à s’installer”, a-t-il déclaré. Enregistré avec ses vieilles machines suite au crash de son ordinateur, “Shadow Of Fear” sonne du coup comme s’il avait été enregistré il y a trente ans. Un disque conseillé à tous ceux qui pleurent encore la disparition de Genesis P-Orridge, et à tous ceux qui souhaitent retrouver ce goût indus, bruit blanc loin de la hype et hors du temps. ✪✪✪