Richard Allen
“Locust Tree Lane” VIOLET SET RECORDS
Il y a d’abord ces deux accords en clair-obscur, égrenés par une guitare acoustique sur laquelle se greffe une voix d’ange, et l’union des deux suscite comme une impression de rebondir au ralenti entre les nuages (“All The Decisions”). Cette sensation déjà éprouvée, à l’écoute de Nick Drake par exemple. Le deuxième morceau, encore plus beau, “The World On Your Chest”, déploie une ligne mélodique pudique, enluminée de subtils contrepoints, choeurs, clarinette, différents vents. On sait peu de choses de Richard Allen. Qu’il vit le jour dans la campagne anglaise à la fin des années 1980, grandit à Amiens (le morceau-titre est inspiré par un chemin de halage local), publia deux EP avec un groupe éphémère, ainsi qu’un album confidentiel. “Locust Tree Lane”, enfanté pendant deux ans, est le fruit de sa rencontre avec le multiinstrumentiste français Kenny Ruby, qui a notamment oeuvré pour Iggy Pop. Ruby a opéré des choix fondamentaux, ciselé la matière brute des chansons d’Allen pour décupler leur éclat : “This Feeling Of You” ou “Little Girl” ravivent à nouveau le souvenir de Nick Drake, dans son versant le plus solaire. Bert Jansch et John Martyn sont d’autres influences manifestes, ce dernier notamment sur l’ultime “Between The Ashes & The Dream”, et sa longue féérie finale. L’écoute des Beach Boys se perçoit aussi dans les harmonies vocales célestes, les légers contrechants qui parsèment une oeuvre organique, révélant ses richesses à chaque écoute. La résurrection du british folk avait jusqu’alors été l’apanage de chanteuses (Laura Marling, Alela Diane). Richard Allen s’inscrit à leur suite comme porteur de cette flamme fragile et ensorcelante. ✪✪✪✪