Michel Cloup, Pascal Bouaziz, Julien Rufié
“A La Ligne” ICI D’AILLEURS
Le livre à succès de Joseph Ponthus s’appelle “A La Ligne — Feuillets D’Usine”. Jeu de mots sur la ligne d’écriture et la ligne de production (“J’écris comme je travaille, à la chaîne, à la ligne”), puisqu’il s’agit d’un compte-rendu au jour le jour du travail en usine d’un déclassé, journaliste et écrivain n’ayant pas trouvé d’autre moyen de subsistance. Un texte fort, les mains dans la fange, qui nous renvoie à “L’Etabli”, le génial livre de Robert Linhart, décrivant l’expérience post-soixante-huit d’un intellectuel en usine. Sa mise en musique s’appelle donc “A La Ligne — Chansons D’Usine”. Ce n’est pas la première fois que Michel Cloup et Pascal Bouaziz travaillent ensemble, résultat d’une amitié de vingt ans, forgée lorsque leurs groupes respectifs — les fantastiques Diabologum et Mendelson — étaient les fers de lance du label indépendant Lithium. Leurs deux voix sont aussi distinctes que complémentaires. L’auteur vient lui-même ajouter la sienne, en coda — ainsi que ses camarades ouvriers dans un émouvant patchwork sur “La Pause”. Michel Cloup et Pascal Bouaziz disent des extraits du livre-poème, si fort qu’il n’est pas besoin d’en rajouter, parfois chantent, comme sur “Penser A Autre
Chose” (superbe). On dirait des textes à eux, notamment “A L’Abattoir”, qui fait penser au terrible “L’Usine” de Bruit Noir — l’autre groupe de Bouaziz. Ces amateurs de bruit structuré à la Sonic Youth traduisent la répétition de gestes et des mots en dissonances de guitares et en rythmes répétitifs obsédants. Le résultat est noble, fier et frappant. ✪✪✪