“The Hippies Of Today Are The Assholes Of Tomorrow”
Dernier volet du panorama des productions PSYCHEDELIQUES sudaméricaines, africaines, asiatiques à l’âge d’or du psychédélisme, avec une discographie (très) sélective.
Troisième partie : Asie
Dans la plupart des pays du MoyenOrient, les productions psychédéliques se limitent souvent à des 45-tours et à des cassettes. D’autre part, les différents régimes politiques répressifs ne favorisent pas la création. En 1979, en Iran, l’arrivée au pouvoir des ayatollahs a stoppé net le développement du rock représenté notamment par Al Basim, “Revival” (1979) ; le sitariste Abbass Mehrpouya, “Mehrpouya Sitar” (1976) incluant “Jumbo Africa” ; Kourosh Yaghmaei, “Back From The Brink (Pre-Revolution Psychedelic Rock From Iran : 1973-1979)”.
Au Liban, plusieurs formations se sont adonnées au psychédélisme, les Sea-ders, “The Sea-ders” (2012) compilation des quatre singles, les News, Jo & The New Magnifici, Elias Rahbani, “Mosaic Of The Orient (Naï, Buzuk & Guitar)” volume 1 (1972) et 2 (1974), l’Egyptien Omar Khorshid, “With Love” volumes 1 et 2 (1977). En Israël, l’album éponyme (1968) des Churchill’s est une référence du psychédélisme. Installés un temps en Angleterre à l’invitation de Robb Huxley, leur guitariste britannique ancien membre des Tornados, ils prennent les noms de Jericho Jones, “Junkies, Monkeys And Donkeys” (1971), puis de Jericho, “Jericho” (1972), en intégrant des influences hard rock et progressives. Par ailleurs, ils participent à plusieurs albums du très populaire chanteur Arik Einstein entre 1969 et 1973, notamment “Poozy” (1969). Premier guitariste des Churchill’s, Yitzhak Klepter forme Apocalypse, “Apocalypse” (1972). Danny Ben Israel enregistre deux albums psychédéliques en 1970, “Bullshit 3 ¼” et “The Kathmandu Sessions” avec le titre “The Hippies Of Today Are The Assholes Of Tomorrow”, paru finalement en 2003. Les albums de Ron Eliran (1969), de Poopik (1969) et de Diaspora Yeshiva (1976) méritent une citation.
La Turquie a vécu une réelle explosion du rock psychédélique de 1966 à 1975 à travers l’Anadolu (Anatolien) rock, chanté en turc mêlant, les influences du rock anglo-saxon et du folklore traditionnel. Une fois encore, les pouvoirs en place ne sont pas très favorables à la libre expression des artistes, mais ceux-ci réussissent malgré tout à toucher un large public, avant tout par les 45-tours et les cassettes. Le chanteur et guitariste Erkin Koray en est la figure emblématique. A seize ans, en 1957, il devient le premier artiste turc à jouer du rock’n’roll en utilisant l’amplification. A partir de 1967, il propose une série de singles psychédéliques intégrant des éléments du folklore turc. Si l’album “Erkin Koray” (1973) est une compilation de ses singles, l’année suivante, “Elektronik Türküler” est son oeuvre la plus connue. Après “2” (1976) et “Tutkusu” (1977), il s’oriente vers le progressif. Parmi les musiciens qui ont abordé différents styles au fil de leur évolution, mais ont laissé une marque dans l’histoire du psychédélisme turc, figure Baris Manço. Après un séjour en Belgique où il signe avec Henri Salvador un contrat de compositeur et d’interprète, il revient en Turquie pour enregistrer une suite de morceaux psychédéliques avec le groupe Kaygisizlar, réédités sur la compilation “Iste Baris Iste Manço” (2019), avant de graver “Dünden Bugüne...” (1971), premier album solo. Cem Karaca & Kardaslar, “Cem Karaca Kardaslar” (2018), compilation des singles. Après Manço, Karaca fut également le chanteur de Mogollar de 1972 à 1974. Débutant en 1968, Mogollar (Les Mongols) est une formation majeure du Anadolu, une des premières à revisiter et à électrifier des chants traditionnels. Le premier album, enregistré en France, “Danses Et Rythmes De La Turquie D’Hier A Aujourd’hui” (1971), est suivi par “Düm-Tek” (1975) et “Mogollar” (1976). Chanteuse contestataire, Selda réinterprète le folk turc sur “Selda” (1976), accompagnée par Kardaslar et Mogollar. D’autres adeptes : 3 Hür-El, “3 Hür-El” (1972) ; Edip Akbayram & Dostlar, “Nedir Ne Degildir ?” (1977) ; Bunalim, “Bunalim” (2006), compilation des singles de 1970 à 1972. En Extrême-Orient, dans les années 1960, les troupes américaines ont apporté le napalm, mais aussi leur culture rock et blues. Avec son industrie puissante et ses pressages de qualité, le Japon offre une production phonographique pléthorique dans tous les genres musicaux, pop, jazz, blues, psychédélisme et hard rock. De nombreux groupes ont façonné un psychédélisme nippon souvent singulier dès 1967, Spiders, “Album n°3” (1967) avant de connaître un âge d’or entre 1968 et 1972. Après la pop ou le garage rock, plusieurs formations ont enregistré des singles et des albums psychédéliques : Mops, “Psychedelic Sounds In Japan” (1968) ; Golden Cups, “The Golden Cups Album” (1968) avec “LSD Blues”, “Recital” (1969) ; Jacks, “Vacant World” (1968) ; Harumi, “Harumi” (1968), cet unique album de Harami Ando d’un psychédélisme baroque a été enregistré à New York par le producteur Tom Wilson ; Beavers, “Viva! Beavers” (1968) ; The Happenings Four, “Magical Happenings Tour” (1968), “The Long Trip” (1971). Claviériste et arrangeur des Happenings Four, Kuni Kawachi enregistre “Kirikyogen” (1970) avec le guitariste des Beavers, Hideki Ishima, et le chanteur Joe Yamanaka, tous deux alors membres de Flower Travellin’ Band. Ce groupe phare du rock japonais a d’abord accompagné Yuya Uchida sous le nom de Flowers : “Challenge!” (1969). Flower Travellin’ Band : “Anywhere” (1970), “Satori” (1971), “Made In Japan” (1972), “Make Up” (1973). Le blues psychédélique est un genre musical très apprécié au Japon : Helpful Soul, “First Album” (1969) ; Apryl Fool, “Apryl Fool” (1969) ; Blues Creation, “Blues Creation” (1969), “Demon & Eleven Children” (1971), en association avec la chanteuse Carmen Maki, “Carmen Maki Blues Creation” (1971). Considéré comme le Jimi Hendrix japonais, le guitariste de Powerhouse, “Powerhouse” (1969), Shinki Chen participe à Food Brain, “Social Gathering” (1970), avec le batteur des Jacks, Hiro Tsunoda, futur Strawberry Path (1971) et Flied Egg (1972). En 1971, il réalise un album solo mythique, “Shinki Chen” (1971), avant de fonder le trio Speed, Glue & Shinki avec le bassiste des Golden Cups et de Food Brain, Masayoshi Kabe, et le chanteur batteur philippin Joey Smith : “Eve” (1971), “Speed, Glue & Shinki” (1972). Si cette dernière formation délivre un acid rock proche du hard rock avec une thématique récurrente, la drogue, Far Out, “Far Out” (1973), précède le virage du psychédélisme vers le progressif de Far East Family Band. Depuis 1995, les hyper productifs Acid
Mothers Temple de Kawabata Makoto prolongent l’expérience psychédélique. Aux Philippines, où le festival Antipolo a attiré plus de dix mille spectateurs en 1970, Joey Smith rejoint, en 1973, Juan De La Cruz groupe du guitariste Wally Gonzales. Les deux premiers albums sont les plus psychédéliques, “Up In Arms” (1971) et “Himig Natin” (1973). Autres productions intéressantes : Anak Bayan, “Anak Bayan” (1977) ; Boy Camara & The Afterbirth (1973). La Corée du Sud est un autre pays où le psychédélisme s’est enraciné dans les années 1960/ 1970, notamment autour du chanteur, guitariste, compositeur et producteur Shin Joong-hyun, ou parfois Jung-hyeon, héros de la résistance à la junte militaire : avec The Donkeys, “The Psychedelic Sound” (1967), “Shin JoongHyun & Donkies” (1969) ; avec The Questions, “In-A-Kadda-Da-Vida” (1970) ; avec la chanteuse Kim Jung Mi, “Sound Vol 2” (1971) ; avec The Men, “Woman Of The Evening Sun”
(1972). Les Golden Grapes, “Sound Vol 3” (1972), les Devils, “I” (1971), He 6, “Vol 1” (1970), les Key Brothers, “Go Go” (1971) ont également gravé des albums à redécouvrir. De 1977 à 2008, San Ul Lim, ou Rim, enchaîne treize albums, du psychédélisme à la pop et au hard rock.
En Indonésie, citons Aka, “Do What You Like” (1970), Panber’s, “Volume 1” (1972), Freedom Of Rhapsodia, “Freedom Of Rhapsodia” (1972) ; Mercy’s, “The Mercy’s” (1973). En Malaisie : les Strollers “The Strollers” (1969), les Red Stars, “The Red Stars” (1973), Truck, “Surprise! Surprise!” (1974). En Inde : Ananda Shankar, “Ananda Shankar” (1970), enregistré à Hollywood, des versions raga rock avec sitar et synthés de “Light My Fire”, “Jumpin’ Jack Flash” et de morceaux plus traditionnels ; The Savages, “Black Scorpio” (1973), garage rock et psyché ; Atomic Forest, “Obsession ‘77” (1977). o