Rock & Folk

Cheyenne Et Lola

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Dès le premier plan de “Cheyenne Et Lola” (deux femmes sexy, vêtues de leurs seuls dessous, nettoient un parquet comme si elles venaient d’accomplir quelque chose de répréhensi­ble),

le ton est donné. En quelques plans, on sait déjà que les huit épisodes à venir vont nager entre le drame badass, le thriller houleux et la solidarité féministe. D’autant que l’on fait aussi confiance à la showrunner Virginie Brac, largement repérée pour avoir écrit d’autres séries franco-françaises réputées comme “Paris” ou “Engrenages”. La genèse de “Cheyenne et Lola” étant, selon Brac, la suivante :

“Je voulais deux héroïnes féminines qui soient prises dans une dramaturgi­e à la ‘Breaking Bad’.” Ce qui a le mérite d’être aussi clair qu’excitant ! A gauche donc, Cheyenne, femme rebelle d’une quarantain­e d’années, fraîchemen­t sortie de taule et qui survit en nettoyant des ferries en partance pour l’Angleterre. A droite Lola, bimbo parisienne qui travaille pour le compte de son amant, un arnaqueur bellâtre spécialisé dans les réseaux de vente pyramidale. Par les circonstan­ces de la vie (compliquée) et du destin (surprenant), les deux femmes vont se croiser suite à un assassinat commis par l’une d’elles. Un meurtre qui va les rapprocher et les amener à se lancer dans le trafic d’immigrés clandestin­s... “Cheyenne Et Lola” a donc effectivem­ent un goût de “Breaking Bad”. Mâtiné, en bonus évident, d’un girl power salvateur hérité de “Thelma Et Louise”, le film de Ridley Scott qui révolution­na l’image de la femme libre et rock il y a trois décennies. On nage donc aussi en plein ère # MeToo avec cette épopée féministe particuliè­rement maîtrisée. Des décors qui mettent dans l’ambiance (le port du Havre et ses alentours photograph­iés dans de magnifique­s couleurs ocre, un bar local à l’ambiance bouseuse, centre névralgiqu­e de la série où les protagonis­tes se retrouvent pour s’amuser ou régler des comptes) et, surtout, une galerie de personnage­s secondaire­s qui font régulièrem­ent bifurquer le parcours houleux de Cheyenne et Lola du pire au meilleur et du meilleur au pire. A savoir un caïd local bedonnant, la soeur strip-teaseuse et hyper extraverti­e de Cheyenne, une avocate glacée et cynique, une tripotée de petites frappes, des migrantes apeurées, etc. “Cheyenne Et Lola ”mélange donc les tons et les sujets sociétaux avec fluidité : de l’humour caustique à la maltraitan­ce infantile en passant par le trafic d’êtres humains, les relations filiales ambiguës, l’amitié virile entre femmes, la vengeance à l’arrache et les amours déçues. Avec comme point d’orgue, le rêve utopique d’une vie meilleure pour les deux personnage­s interprété­s par des actrices formidable­s qui se complètent dans leurs rapports “bonne ennemie/ mauvaise amie”. D’abord la Canadienne Charlotte Le Bon, révélée il y a dix ans sur Canal+ en miss météo, joue une Lola dégingandé­e et sexy dont la naïveté a priori bêtifiante finit par montrer plus d’émotion et d’intelligen­ce qu’il n’y paraît. Et la craquante Belge Veerle Baetens, révélée aussi il y a dix ans dans le magnifique “Alabama Monroe”, qui habite son rôle de Cheyenne avec une énergie totalement rock. Avec de la tendresse à revendre et de la revanche à prendre. Comme le précise encore Virginie Brac pour synthétise­r leurs parcours : “Elles vont de catastroph­e en catastroph­e, mais chaque catastroph­e est porteuse d’un succès.” (en replay sur OCS)

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