Rock & Folk

The Velvet Undergroun­d

“THE VELVET UNDERGROUN­D”

- ALEXIS BERNIER

MGM

Le temps a passé, Andy Warhol s’est lassé. La cote publique du Velvet Undergroun­d est au plus bas, après un deuxième album frondeur. “White Light White Heat”, véritable hymne à la gloire des amphétamin­es, enregistré au débotté, mâchoires crispées et vumètres dans le rouge, n’a rencontré aucun public. Lou Reed, jaloux et tyrannique, a subitement congédié John Cale sans raison précise, embauchant à sa place Doug Yule, jeune bassiste talentueux mais convention­nel, qui au moins ne lui fera pas d’ombre. Nico est elle aussi partie reprendre son erratique carrière solo. Livré à lui-même, le groupe a mué peu à peu. “J’en suis arrivé à un point où je préfère les jolies choses plutôt que la distorsion, parce que l’on peut être plus subtil, dire vraiment quelque chose et apporter ce calme dont les gens semblent avoir besoin aujourd’hui. Nous sommes désormais un groupe joyeux et heureux”, déclare Lou à qui veut l’entendre. Et, de fait, le troisième album du Velvet Undergroun­d est un disque apaisé. “Beginning To See The Light” en est la parfaite démonstrat­ion. Hilare, Lou chante, sur une rythmique allègre et débridée, qu’il en a fini avec “le vin le matin et le petit déjeuner le soir” et qu’il commence “à voir la lumière”. On aimerait le croire. Après le temps des fulgurance­s électrique­s, voici celui des ballades désabusées et, quoi qu’en dise Lou Reed, un brin cyniques. Sur “That’s The Story Of My Life”, ne chante-t-il pas qu’il y a une différence entre le bien et le mal mais que ces deux mots “sont morts” ? Ne va-t-il pas jusqu’à implorer “Jesus” afin qu’il l’aide à trouver sa place dans le monde ? Ses chansons ne sont douces qu’en apparence. “After Hours”, qu’il fait chanter par Moe Tucker, en remplaceme­nt de Nico qu’elle détestait, n’était-il pas un exercice de pure cruauté mentale ? De tout le disque, “The Murder Mystery”, longue ballade absconse parlée et chantée alternativ­ement ou simultaném­ent par tout le groupe, est le morceau qui rappelle le plus le vieux Velvet déjanté. Bien qu’ayant à l’époque quelque problème de voix, Lou Reed n’a jamais aussi bien chanté que sur ce disque, qui est la parfaite incarnatio­n du versant mélodique du Velvet Undergroun­d. Un disque entre deux eaux : “Sometimes

I feel so happy, sometimes I feel so sad.”

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