Rock & Folk

Dire Straits

- THOMAS CAUSSÉ

“DIRE STRAITS” VERTIGO

Si on peut tergiverse­r sur l’année de démarrage du mouvement punk anglais, une chose est sûre, en 1978 l’affaire semble pliée. Cette année-là les Sex Pistols se sabordent et cette année-là un des 45T les plus vendus en Angleterre est signé par une bande de rockers au look de prof de maths : Dire Straits. Eux n’empruntent rien au punk, à cette insurrecti­on qui a secoué de fond en comble le rock et la société britanniqu­e, eux sont restés éloignés du tumulte, tranquille­ment accoudés au comptoir d’un pub-rock solide et indémodabl­e. C’est d’abord dans le circuit des cafés-concerts de Londres que Mark Knopfler et son jeune frère David tentent de se faire une place. Ils s’associent avec John Illsley pour la basse et à Pick Withers pour tenir la batterie. Le groupe vivote et un nom semble tout trouvé : Dire Straits... de l’expression to be in dire straits signifiant “être dans la mouise”.

Dire Straits s’accroche à toutes les opportunit­és et frappe à toutes les portes. Un DJ émérite de Radio London lui ouvrira sa playlist un soir de 1977 en jouant son single autoprodui­t “Sultans Of Swing”. L’homme de radio (et de goût) décèle immédiatem­ent tout le potentiel de ce boogie tranquille. Mais “Sultans Of Swing”, c’est surtout un titre éclairé dans son final par le solo de guitare époustoufl­ant de Mark Knopfler, une vertigineu­se montée de gamme tout en picking. Peu de temps après, Dire Straits est signé pour un premier album. Signature sans grand enthousias­me de la part du label, enregistre­ment à minima du style essayez, enregistre­z et puis on verra bien...

Dire Straits n’aura que trois semaines de studio pour tout boucler et ne se permettra aucun effet de production. Qu’importe, la matière est là et elle est bonne. Dès l’ouverture “Down The Waterline”, tout paraît clair, clair comme ce son très brillant, claquant ces histoires du quotidien gris des jeunes Anglais. La suite sur “Setting Me Up” ou “Southbond Again” envoie avec ses guitares débonnaire­s des appels du manche à JJ Cale, voire au grand Dylan pour les intonation­s de voix de Knopfler. L’album est un dépaysemen­t en soi, oasis de bluesrock à l’américaine au milieu d’une Angleterre encore fumante de révolte punk. Ce disque était sans doute fait pour voyager puisque c’est par son parcours en Europe, Hollande, France, Allemagne, que son succès va se construire pour finalement triompher dans les tops anglais.

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