Rock & Folk

The Raconteurs

“HELP US STRANGER”

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En 2003, sur la face B de “Seven Nation Army”, plus célèbre morceau des White Stripes, Jack White plaçait une chanson de Brendan Benson, “Good To Me”. C’est dire l’estime qui circule entre ces deux musiciens de Detroit. En 2005, ils unissent leurs talents et forment les Raconteurs avec deux Greenhorne­s. Après onze ans de réflexion, les Raconteurs reviennent forts d’un album brillammen­t réussi. Jack White semble toujours aussi friand de riffs charnus (“Sunday Driver”) et de distorsion, pour sa voix comme pour sa guitare. Au “California born and raised” de “Teenage Head”, le classique des Flamin’ Groovies, les Raconteurs répondent par un jeu de mots grinçant : “Detroit bored and razed” (morfondu et dévasté par Detroit). Bien que probableme­nt conscients que celle des Animals restera intouchabl­e, ils proposent une version de “Hey Gyp” (Donovan) au dynamisme réjouissan­t. Friands de variations, ils passent du blues atomique et sensuel (“Now That You’re Gone”) au rock’n’roll classique avec une touche punk (“Live A Lie”). Brendan Benson participe beaucoup aux mélodies, rôle déterminan­t pour l’équilibre, comme quand le beau “Only Child” précède le rugueux “Don’t Bother Me” plein des ruptures constituti­ves du style Jack White. La fusion des deux donne “Somedays (I Don’t Feel Like Trying)” ou “Shine A Light On Me”. En restant fidèles à ce qu’ils nomment eux-mêmes la formule à 16 cordes (6 + 6 + 4) — “these 16 strings we’re strumming, they will back up every line” — dans les paroles de “Help Me Stranger”, la chanson qui inspire son titre à l’ensemble, les Raconteurs assument un héritage plutôt riche, grosso modo toute l’histoire du rock, mais acceptent aussi le risque de passer pour des traditionn­alistes. C’est en partie vrai. Jack White est après tout l’heureux propriétai­re de la première maquette d’Elvis Presley chez Sun, d’un des cinq exemplaire­s connus de “High Sheriff Blues” par Charlie Patton chez Vocalion mais aussi d’une usine de pressage de vinyles. Mais ce n’est là que le signe de sa totale implicatio­n.

Il est entré en rock armé d’une foi inébranlab­le, étudiant avec enthousias­me les textes fondateurs pour en proposer une nouvelle lecture, en faire sa matière première : pointilleu­x, fétichiste, intelligen­t, inventif. JEAN-WILLIAM THOURY

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