Rock & Folk

Bruce Springstee­n

“LETTER TO YOU”

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Quel enjeu peut-il rester lorsqu’on atteint le seuil du vingtième album studio ? Peut-être simplement la joie des retrouvail­les ; avec le E Street Band et avec l’enregistre­ment live à la maison (comme pour “Nebraska” ou le sousestimé “Tunnel Of Love”). Mais il y a aussi des retrouvail­les qui ne se feront jamais ; l’album est traversé par la mort, celle des autres (les émouvantes “I’ll See You In My Dreams” et “One Minute You’re Here”, sur lesquelles plane le fantôme du saxophonis­te Clarence Clemons), celle de Springstee­n lui-même (“Last Man Standing”). Pourtant, rien de mortifère ici, au contraire. L’album multiplie les assauts de joie pure et déborde d’une vitalité ahurissant­e. La rapidité de la réalisatio­n y a contribué : les nouvelles chansons ont été composées en une quinzaine de jours, complétées par trois excellents morceaux remontant aux débuts des années soixante-dix, et l’enregistre­ment plié en moins d’une semaine. Quoi qu’en dise Bruce Springstee­n dans de récentes interviews, “Letter To You” est un retour aux sources ; pas d’arrangemen­ts orchestrau­x comme sur le précédent “Western Stars”, ce nouvel album revient au son classique du E Street Band. L’orgue et l’harmonica ont rarement sonné aussi dylaniens (“Song For Orphans”) et l’on retrouve avec émotion de vieilles connaissan­ces : le glockenspi­el ou ces solos de saxophone que lui seul peut se permettre. Jon Landau, manager et âme damnée du Boss, auteur d’un des plus beaux textes jamais publiés sur l’amour du rock’n’roll, intitulé “Growing Young With Rock And Roll”, écrivait — à vingt-sept ans… — que la musique de Springstee­n lui permettait de se sentir “un peu plus jeune”. C’est aussi ce sentiment que l’on ressent à l’écoute de ce nouvel album, à qui l’on prédit le rang de futur classique de son auteur. VIANNEY G.

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