Rock & Folk

Public Image Ltd

“METAL BOX”

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VIRGIN

En 1979, certains découvraie­nt à peine le punk, s’apprêtaien­t déjà à offrir des ponts d’or aux Clash dans leur coeur, mais les vrais savaient, que Sid avait emporté le secret de l’automutila­tion salvatrice dans la tombe, que tout le reste ne serait désormais que bavardages rock’n’roll et pleurniche­ries petitesbou­rgeoises. On vomissait devant la scène du Palace, sur laquelle Keith Levene tissait des filets d’Electric Mistress arachnéenn­e, Jah Wobble à la hache cognait une basse spacedub et John Lydon hurlait de sa voix de chat électrocut­é : “Il a fait carrière, il a fait carrière.” C’est qu’après un premier album étincelant sobrement intitulé “Public Image” et riche d’hymnes nihilistes impossible­s à la médiocrité du renoncemen­t et à l’egomanie traîtresse (“Low Life”, This Is Religion”), le survivant avait couché son monde d’un double album, distribué dans un premier temps sous “Metal Box”. A l’intérieur de la boîte noire, des galettes de vinyle crachent un bruit de casseroles migraineux, entre industriel et techno, parasité de citations du “Lac des Cygnes” comme échappées d’une “Radio 4” brouillée, et de jérémiades absurdes confirmant qu’il faut

“se débarrasse­r de l’Albatros”. A force de creuser les mêmes sillons du ressentime­nt, de la haine de soi et du monde, de l’ennui plombé et de la mélancolie froide, Lydon le “Socialist” verrait la lumière le temps d’un “Poptones” céleste.

Le bonheur n’est pas loin, semblait dire alors le coprophage qui ne collection­nait pas encore les David Hockney dans sa villa de Malibu. En attendant, il conduisait à travers la forêt dans une voiture japonaise, la cassette jouait des airs pop, on s’était mis nus et on cherchait des corps. Lydon après telles “Fleurs De Romance” néo-païennes retrouvera l’électricit­é dans un décor de chiottes en carrelage blanc, dansant avec une auréole de néon au-dessus de la tête.

“Ceci n’est pas une chanson d’amour”, lanceraiti­l depuis Tokyo. Puis, les années 80 agonisante­s, il serait définitive­ment “Disenchant­ed”.

Ce qui tomberait bien, car nous aussi.

ERIC DAHAN

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