Rock & Folk

Rod Stewart

“EVERY PICTURE TELLS A STORY” MERCURY

- CHARLES FICAT

Lorsqu’il entre en studio pour enregistre­r ce qui deviendra “Every Picture Tells A Strory”, Rod Stewart n’en est pas à sa première métamorpho­se. Avec cet album, il abattait une carte qui allait devenir un chef-d’oeuvre. Les titres partaient dans de multiples directions, rock, blues, folk, mais le concepteur parvenait à maintenir une cohérence tout du long. Pour moitié le disque était composé de reprises : “That’s All Right Mama” d’Arthur Crudup, repris à l’époque Sun par Elvis Presley, suivi de “Amazing Grace” ; “Tomorrow Is A Long Time” de Dylan interprété magnifique­ment — rareté dylanienne qu’Elvis avait lui-même repris en 1966 sur “Spinout” ; “(I know) I’m Losing You” des Temptation­s où l’accompagne­nt les membres des Faces et “(Find A) Reason To Believe” de Tim Hardin. Tout cela était concocté avec le plus grand soin. D’ailleurs Rod Stewart lui-même produisait l’album. Figuraient ensuite d’autres morceaux de bravoure. La chanson qui donne son titre à l’oeuvre, co-écrite avec son complice des Faces, Ron Wood, s’impose d’emblée comme un classique. Il sera repris en 1986 sur leur premier album par les Georgia Satellites. Aujourd’hui les paroles heurtent les sensibilit­és et Rod fut amené à en modifier certains vers afin de les adapter à l’évolution des mentalités. Cela ne retire rien à la force de cette fresque autobiogra­phique qui mène de Paris et Rome aux confins de l’Asie, sorte de travel-writing rock’n’roll. L’autre monument du disque reste “Maggie May”, où le narrateur exprime l’ambiguïté de sa relation avec une femme plus âgée que lui et qui à ses yeux le manipule... La candeur des sixties n’avait plus cours, on entrait dans les années 1970 et Stewart avait bien perçu les changement­s à l’oeuvre. Le public les comprit également et fut présent au rendez-vous. Fait rare, cet album se classa numéro 1 des deux côtés de l’Atlantique, tout comme le single “Maggie May”. “Every Picture Tells A Story” n’est qu’une station dans la vaste carrière de Rod the Mod, mais il reste un moment de grâce — tels ces passages au violon ou à la mandoline qui évoquent la musique élisabétha­ine ou encore les fulgurance­s de Martin Quinttento­n à la guitare acoustique. Disque total, absolu, cette photograph­ie racontait une histoire, celle de Rod Stewart dans son époque. D’autres épisodes allaient suivre, pas toujours de la meilleure inspiratio­n, qu’importe.

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