Rock & Folk

The Rolling Stones

- THOMAS E. FLORIN

“THE ROLLING STONES” DECCA

Quand les Rolling Stones sortent leur premier album, ils jouent depuis moins de deux ans et leur premier concert avec Charlie Watts est frais de quinze mois. C’est encore un pur groupe de R’n’B qui remplit son premier LP de neuf reprises et deux morceaux “à la manière de”. Pétris d’amour pour la musique noire américaine, ces gamins anglais reprennent Motown, beaucoup de Chess, d’autres bluesmen et même un Rufus Thomas. Voici les Stones du début : Mick Jagger (dix-neuf ans) apprend à bouger, Keith Richards (dixneuf ans) met encore son cul en arrière (comme John Lennon), Brian Jones (vingt et un ans) attire tous les regards, Charlie (vingt-deux ans) a déjà la nonchalanc­e, Bill Wyman (vingt-sept ans) la tête de cocker. Puis, il y a Ian Stewart, le sixième Stones, qui joue sur quasiment tout l’album. Avant même d’entendre le son, les Rolling Stones choquent leur public — qui a entre neuf et vingt ans — dès la pochette. Ils n’ont ni la frime des Noirs américains, ni les uniformes des autres groupes anglais. Pas de cravate sur scène, mais de petits pantalons qui leur font des jambes de criquet, des beatles boots mais en velours, des gilets portés sans veste, du cuir déjà ! Et moins d’un an plus tard, des cols roulés, des casquettes et des lunettes de soleil.

À la scène comme à la ville. Si certaines de leurs reprises prêtent désormais à sourire (ils sont faux sur le “Honest

I Do” de Jimmy Reed, la version de

“I’m A King Bee” est toute mignonne à côté de l’originale de Slim Harpo), ils y ont ajouté cette morgue adolescent­e.

“I Just Want To Make Love To You” joué à fond la caisse, les accords moulinés sur la Vox Phantom et les petites phrases assassines sur la Les Paul, voilà comment veulent faire l’amour les adolescent­s : frénétique­ment. Quant au “Carol” de Chuck Berry, les Stones en préservent tout le fun en lui ajoutant le côté mauvais garçons des groupes garage. Trois originaux sont à signaler sur ce LP : l’instrument­al “Now I’ve Got A Witness”, “Little By Little” produit chez Spector, et la première pop song des Rolling Stones, “Tell Me”, qui annonce toutes les beautés baroques à venir. En trente minutes de musique, les Stones avaient posé leur première pierre.

 ??  ?? 19 64
19 64

Newspapers in French

Newspapers from France