Rock & Folk

Les Rita Mitsouko

- FRANÇOIS DUCRAY

“THE NO COMPRENDO”

VIRGIN

Monsieur et Madame Ringer ont une fille...: Catherine. Rétrospect­ivement, on songe qu’on aurait aimé avoir pu leur dire : ah-la-la, bravo... et bonne chance. Est-ce que le Créateur, s’il n’en est qu’un, prévient les parents lorsqu’il sait qu’ils vont avoir un enfant comme ça ? Ou bien est-ce que, n’y étant pour rien, il boude et ne dit rien ? Parce que, tout de même, il faut se demander d’où peut venir qu’un jour, une jeune femme qui fut une petite fille en arrive à imaginer et chanter de telles choses. Elle, elle attrape une colère grosse comme ça et répond en dansant et haletant que “C’Est Comme Ça” et pas autrement, la-la-la-la-la, sur quatre tons, puisqu’elle a quatre octaves à sa voix... Non, sans blague, “The No Comprendo”, on ne pouvait pas prévoir. On aurait dû pourtant, dès le premier album, celui où les roucouleme­nts intraduisi­bles de “Marcia Baila” cachaient une forêt de trucs bizarros et gonflés à la foi en soi, dos au mur, de Catherine et Fred — lui, c’est l’oiseau à longues pattes du bitume de Paname, un musicien gourmet fait main, un cas aussi... On aurait dû se douter de quelque chose et on l’a fait, un peu, pas assez. Par manque d’imaginatio­n, d’entraîneme­nt : tout un album du niveau de “C’Est Comme Ça” mais jamais pareil, on n’avait tout simplement jamais reçu ça ici, d’ici. Enfin, ici, c’est certain, mais d’ici un peu moins : les Rita ont pour politique de piquer leurs antennes à choper les idées et les sons dans tous les sens, où ça leur chante. Et ça leur chante comme ils vivent et se sapent, au pif, au culot, au collage. Ils n’ont aucune notion de l’établi, du définitif, de l’inertie qui en découle. “The No Comprendo” n’est que bougeotte, appétits divers, cocasserie­s goulues, même quand ça bouge enlacé, lentement, par exemple à la façon du combat SM de “Un Soir, Un Chien” qui est aux Mitsouko ce que “Midnight Rambler” est aux Stones. Il y a frotti-frotta de funk et rumba, rock et java dans ce bal sensuel, des paroles écrites par une fan de Prévert qui révère également Dalida, des musiques emballées par un type persuadé que Prince sait aussi se faire à manger. Ce disque génial s’ajoute naturellem­ent aux disques géniaux qu’affectionn­aient les Rita Mitsouko. Suffisait d’y penser, pas vrai ?

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