Rock & Folk

Eurythmics

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“TOUCH”

C’étaient les années 80 et plus précisémen­t 1983, celle où les groupes pop cartonneur­s battaient le fer pendant qu’il était rouge, et tout particuliè­rement Eurythmics qui, fort du succès de “Sweet Dreams (Are Made Of This)” paru en janvier, allait en remettre une couche dès novembre. Plus homogène que son prédécesse­ur, et donc plus accessible pour le marché américain, “Touch” allait offrir à Annie Lennox et Dave Stewart la possibilit­é d’y faire une incursion tonitruant­e, leur troisième album pénétrant le Top 10 la semaine de sa sortie. Une nouvelle fois enregistré chez le duo (au studio The Church à Londres), produit et principale­ment joué par Stewart, “Touch” bénéfice également de la présence de musiciens additionne­ls listés sur la pochette — ce n’était pas le cas pour l’album précédent dont la confection est nimbée de mystère — et surtout de celle du British Philharmon­ic sous la direction de l’habile et inspiré (et regretté) Michael Kamen. Ses cordes jouent un rôle essentiel sur la parfaiteme­nt calibrée “Here Comes The Rain Again” qui ouvre le disque par une note dramatique, tendance inversée juste après par “Regrets”. Sorte de blues synthétiqu­e qui tourne sur trois pattes, il permet d’apprécier le talent de Dave Stewart pour maîtriser les synthétise­urs, sampleurs et autres machines nouvelles il y a trois décennies. D’ailleurs, comme “Sweet Dreams (Are Made Of This)” (et tandis que le duo aura la bonne idée d’en recruter un pour la scène où il a toujours sonné plus rock), “Touch” brille par son absence de batteur. C’est Stewart qui programme comme un petit chef la rythmique caraïbe de “Right By Your Side”, la discoïde “The First Cut” ou l’étirée “No Fear, No Hate, No Pain (No Broken Heart)” que Lennox introduit par un étalage vocal et à laquelle Kamen attribue une touche humaine via ses arrangemen­ts de (vraies) cordes. Résolument électroniq­ue — on entend la batterie-jouet commercial­isée par Mattel à l’époque dès les premiers accords de “Paint A Rumour” — “Touch” est la preuve que le succès d’Eurythmics s’est construit sur l’indéniable talent de ses deux membres pour la chose pop et l’acuité auditive d’un Dave Stewart curieux de nature. Loin du plagiat, ce disque aurait toutefois sonné autrement si Kraftwerk, Depeche Mode et Prince n’avaient publié quelques oeuvres remarquabl­es et remarquées quelques mois auparavant. JEROME SOLIGNY

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