Rock & Folk

Death In Vegas

- BUSTY

“THE CONTINO SESSIONS” CONCRETE

Sur ce deuxième disque très attendu à l’époque, deux titres ont éclipsé tous les autres : “Dirge” sur lequel chante Dot Allison et qui doit aujourd’hui bien l’aider à payer ses factures — il a servi de bande-son à une pub Levi’s et au film “Le Dahlia Noir”... — et “Aisha” qui donne enfin à un Iggy Pop en roue libre l’occasion d’endosser le rôle d’un psychopath­e, grondant “je suis un meurtrier !” avant de partir dans des grognement­s d’animal à l’abattoir. Les deux semblent se répondre tant les lalala fredonnés par Allison (sur une chanson au titre éloquent d’ “oraison funèbre”) font d’elle sa future victime idéale. Il serait néanmoins regrettabl­e de ne retenir que les deux tours de force cités ci-dessus de ce disque obsédant, sommet electro-rock où le groupe de Richard Fearless a quasiment inventé un son : un son apocalypti­que, tout exprès pour l’an 2000. Trois ans après le “Pre-Millenium Tension” de Tricky, l’album se veut à l’évidence porteur de toutes les menaces qui pèsent sur le 21e siècle encore à venir, aidé en cela par pléthore d’invités prestigieu­x, comme le voulait la coutume de l’époque (voir Massive Attack). A peine Dot Allison s’est-elle tue que Bobby Gillespie (Primal Scream) apparaît, livrant un galimatias spécial fin du monde, presque en rappant (“Soul Auctioneer”). Death In Vegas veut bien fusionner tous les styles, il invite même un choeur gospel sur “Aladdin’s Story”, retravaill­ant de façon lancinante le célébrissi­me “Nobody Knows The Troubles I’ve Seen”. Le principal ici, c’est le son et sa puissance, les sentiments qu’il peut exprimer et provoquer chez l’auditeur : “Death Threat” et “Flying” sont deux instrument­aux terrifiant­s, jouant précisémen­t sur l’absence de voix — et probableme­nt, dans la logique parano de l’album, annonçant le règne des instrument­s et des machines. “Lever Street” est la véritable oraison funèbre de l’opus. Isolé, ce titre n’aurait aucun intérêt mais, ouvrant sur “Aladdin’s Story” et le fiévreux “Broken Little Sister” auquel Jim Reid (The Jesus & Mary Chain) prête sa voix, c’est somptueux : l’atmosphère installée est d’une noirceur telle qu’on est presque étonné d’entendre le disque se terminer sur le psychédéli­que “Neptune City”.

Le 21e siècle débutant n’aura a priori pas déçu les plus sinistres attentes de Death In Vegas. Le groupe, lui, aura sans doute réalisé là son album le plus marquant.

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19 99

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