Larry Williams
“THE LARRY WILLIAMS SHOW” DECCA
Chauffe Marcel ! Le temps de pousser les tables à coup de pieds et c’est une déflagration de rhythm’n’blues qui vient frapper nos tympans. Passé l’intro façon bande de louches traînant autour du jukebox, l’inventeur de “Space Guitar” Johnny Guitar Watson sort soudainement son engin à planter des clous et déclenche les bacchanales, la valse des croupions : Good God ! le “Whole Lotta Shakin’ Goin’ On” du Killer vient juste de verser le premier sang... Pas le temps de sécher, les brûlots s’enchainent à vitesse grand V (entrecoupés de titres plus lents, histoire de ne pas perdre complètement pied dans la bataille) : “Looking Back”, l’enfer amphétaminé de “Trust In Me”, “Slow Down”, “Louisiana Hannah” jusqu’à l’exploit final, une version parfaite du “For Your Love” des Yardbirds. En 1965, les deux loustics sudistes enquillent les dates d’une tournée anglaise et se mettent à la colle avec un groupe UK, les Storsmville Shakers, qui envoie tout ce qu’il a dans le ventre. Qu’on ne s’y trompe pas, Larry Williams est déjà une légende : des Beatles aux Flamin’ Groovies, des Stones à Dr Feelgood, tous ont usé leurs boots sur ce rhythm’n’blues tendu à bloc qu’il enregistrait dans les fifties chez Specialty, maison de Little Richard et Lloyd Price (il deviendra son chauffeur et ami et reprendra par la suite — après la version d’Elvis — “Lawdy Miss Clawdy”, rien que ça). L’album, conçu et enregistré en live au Ricky Tick de Guilford, sans applaudissements, est un véritable défi à l’immobilisme ; rester assis est quasiment impossible. Williams chante sans brailler et pilonne son piano autant qu’il peut pendant que Watson assure la gâchette en balançant des rythmiques ultra nerveuses. Rafales de mitraillette dont se souviendra, on peut le parier, l’as des as Wilko Johnson. Les Américains sont des professionnels et pour faire danser le client, tous les trucs sont permis. C’est ainsi que pour nos javas passées et futures, il est toujours important de dégainer cette foot stompin’ music (Geno Washington et Hamilton Bohannon seront priés d’y participer), ces douze titres comme remède à l’apathie. D’autant que l’ami Larry n’en produira jamais d’autres : ce proxénète notoire s’est tiré une balle dans le caisson il y a de cela quarante ans...