Rock & Folk

“Woodstock”

“MUSIC FROM THE ORIGINAL SOUNDTRACK AND MORE” “TWO”

- BENOÎT FELLER

COTILLION

Selon l’expression consacrée, le meilleur côtoie ici le pire. Six faces vinyle, c’est énorme et, bien sûr, c’est trop. Et pourtant, tous les artistes qui passèrent au festival n’apparaisse­nt pas forcément ici. Certaines exclusions sont assez mystérieus­es : celle de Johnny Winter, de Grateful Dead et de la grande Janis Joplin notamment. Ensuite les ratages sont nombreux : on entend beaucoup trop Crosby, Stills, Nash & Young, lesquels ne sont pas vraiment au sommet de leur forme. John Sebastian n’a rien à dire et, de plus, le dit mal. Le Paul Butterfiel­d Blues Band loupe complèteme­nt son set, Jefferson Airplane aussi. Au total, les deux tiers de ce qui est proposé ici ne méritent pas d’être achetés. Seulement voilà, il y a le tiers restant. Le caractère grandiose de l’affaire, la folie de la foule ne pouvaient transfigur­er la mauvaise musique. La bonne, elle, a gagné un je-ne-sais-quoi de sacré. Le festival a lancé Santana et Joe Cocker, chacun sait cela. Le “Soul Sacrifice” des premiers et le “With A Little Help From My Friends” du second n’ont rien perdu de leur magie aujourd’hui. Richie Havens, folk-singer noir disparu en 2013, chante un morceau fantastiqu­e (“Freedom”) et les Who livrent une bonne version de “We’re Not Gonna Take It”. Ce que jouent les autres artistes semble sortir d’un autre monde, même quarante-deux ans plus tard. Ten Years After étire son “I’m Goin’ Home”, extrait du deuxième album, l’excellent “Undead”, et produit un medley blues-rock fou de sensualité et de hargne que traversent, comme des épées de feu, de nucléaires solos de guitare. Canned Heat, Sly & The Family Stone et Jimi Hendrix offrent, chacun à leur façon, des instants qui symbolisen­t tout le meilleur de ce que le rock a à offrir. Le “Woodstock Boogie” de Canned Heat, groupe auquel on doit également la très belle chanson “Goin’ Up The Country” qui sert de générique au film, est ce que le groupe a laissé de plus beau. Sly Stone porte, avec son “Wanna Take You Higher”, l’incandesce­nce woodstocki­enne à son point ultime et c’est fabuleux. Jimi Hendrix est destroyé, assez lointain, ou loin plutôt, et génial. Aujourd’hui encore, la version du “Star Spangled Banner” jouée ce jour-là et au long de laquelle le guitariste recrée avec sa seule guitare tous les bruits produits par un bombardeme­nt aérien, demeure sans nul doute ce que le rock a jamais connu de plus révolution­naire.

 ??  ?? 19 70
19 70

Newspapers in French

Newspapers from France