Twin Peaks
“DOWN IN HEAVEN” GRAND JURY
Après deux albums salués, les Twin Peaks poursuivent leur mue. Leur premier album, “Sunken”, était lo-fi au possible. Le suivant, “Wild Onion”, plus travaillé, leur avait ouvert les portes du succès. “Down In Heaven” démontre que Twin Peaks n’est pas qu’un feu de paille. Pour enregistrer cet album, le désormais quintette — le clavier Colin Croom, présent sur scène depuis des années a officiellement rejoint le gang — s’est isolé dans une maison perdue au bord d’un lac du Massachussetts, bien loin de la grisaille urbaine de sa ville de Chicago. Entre deux baignades dans le lac, les cinq comparses ont investi le salon de la maison d’un de leurs amis transformé en studio impromptu. Dans cette ambiance à la Big Pink, les Twin Peaks ont ainsi pu enregistrer (sur bandes) dans une totale autonomie, expérimentant à loisir. Un mois durant, ils ont poli les magnifiques chansons qui composent ce disque, se révélant aussi fins compositeurs qu’arrangeurs. Des cuivres de “Heavenly Showers”, au clavecin de “Lolisa”, du saxophone de “Wanted You” au clavier à la Al Kooper de “Cold Lips”, les jeunes musiciens témoignent ici d’un remarquable sens du classicisme. D’un titre à l’autre, le groupe revisite les années soixante à sa manière : les Rolling Stones de “Let It Bleed” sur “Wanted You” et “Keep It Together”, les Kinks de “Victoria” sur “Walk To The One You Love”, la légèreté des Monkees sur “My Boys”, la chaleur rustique du Band sur “Getting Better” et “Stain”. Eparpillement ? Pas du tout. Twin Peaks possède une certaine ouverture d’esprit et surtout quatre compositeurs doués. Si les guitaristes/ chanteurs Cadien Lake James et Clay Frankel sont les figures de proue, leurs camarades Jack Dolan (basse) et Colin Croom (clavier) apportent également leur écot. De cette compétition amicale sont nés quelques petits tubes tels que “Walk To The One You Love” (de James), “Butterfly” (Frankel) ou “My Boys” (Dolan). Certains feront remarquer qu’avoir trop de compositeurs dans un groupe n’est pas une bonne chose mais, s’agissant de celui-ci, le meilleur est tiré de la situation. L’absence d’ego, le sens de la camaraderie et l’enthousiasme de ces jeunes gens font de Twin Peaks un des groupes les plus attachants du moment.