Willie Nelson
“SHOTGUN WILLIE”
ATLANTIC
“You can’t make a record if you have nothing to say, you can’t play music if you don’t know nothing to play.” Ces mots lapidaires font de Willie une sorte de Ice T de l’époque et pourraient s’appliquer à de si nombreux artistes contemporains... En l’occurrence, ils introduisent le premier album du cow-boy rouge pour Atlantic, juste après la fin de son contrat avec RCA, ainsi que le commencement de sa carrière d’outlaw country. Premier chanteur country du label de Jerry Wexler, ce dernier produira les 2 reprises de Bob Wills tandis que Waylon Jennings s’occupe de plusieurs parties de guitares. Tout comme Doug Sahm. Les cuivres à mi-chemin de “Shotgun Willie” surprennent et apportent une caution Memphis dans un album traditionnellement country et enregistré à New York. Nelson enregistre depuis 1962 mais “Shotgun Willie” aura toutes les vertus d’une renaissance. Sur la ballade ”Slow Down Old World”, la voix de Nelson épouse des contours traînants et geignards typiques de Nashville mais elle possède suffisamment de modulations pour porter un versant pop et des intonations rappelant Elvis. Cette maîtrise de l’organe vocal au fil des chansons (comme l’entraînant “Stay All Night (Stay A Little Longer)” de Bob Wills lui fera dire que “Shotgun Willie” est l’album où il maîtrisa enfin sa fameuse voix double. En écoutant en boucle “Devil In A Sleeping Bag”, l’évidence tombe : ce disque a certainement dû influencer considérablement les oeuvres entières de Steve Earle et autres country rockers des vingt dernières années. Le disque recueillera d’excellentes critiques à sa sortie mais aura un succès commercial très relatif. Histoire de devenir une figure contestataire incontournable, Willie Nelson sera embastillé l’année suivante pour possession de marijuana. “Shotgun Willie”, album fondateur du mouvement Outlaw, indique que les racines musicales de Nelson ou son acolyte texan Jennings puisent également leurs racines dans le gospel et le blues des Afro-Américains. Ce sera l’arrivée d’un héritage important dans la transformation, pas à pas, des codes jusqu’alors très rigides de la musique country and western. Certains n’hésitent pas à qualifier Nelson de meilleur vocaliste de la country, de Sam Cooke du genre. “A Song For You” adhère à cette thèse en clôturant ce formidable album de transition.